lundi 29 février 2016

FIFA. Un technocrate suisse en chasse un autre

FIFA. Un technocrate suisse en chasse un autre

Christophe Deroubaix
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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À Zurich (Suisse), vendredi, Gianni Infantino a remporté le scrutin dès le deuxième tour, devançant le cheikh Salman, membre de la famille royale de Bahreïn.
Photo : Olivier Morin/AFP
Gianni Infantino, le nouveau président de la Fifa, affiche le même profil que son prédécesseur, Sepp Blatter, et le même discours éternellement rassurant. Tout va bien au monde des scandales et des crises.
Lors du tirage au sort de l’Euro 2016 en décembre dernier, Gianni Infantino, alors secrétaire général de l’UEFA, avait égayé le moment de petites plaisanteries, de mots supposés d’esprit. En cinq langues, s’il vous plaît, seule la bonne blague en araméen nous ayant été épargnée. Histoire de montrer qu’un hyperpolyglotte comme lui, de bonne humeur permanente, qui plus est, pouvait prétendre à voir plus haut que la seule Europe. Aussitôt élu président de la Fifa, vendredi, il a confirmé son humour de comique troupier en déclarant : « La Fifa a traversé des moments tristes, une crise, mais c’est derrière nous. Nous devons aller de l’avant et appliquer les principes de bonne gouvernance. »
Dans les couloirs des palais de justice suisse ou américain, on a dû se prendre les côtes pendant quelques minutes. Qui peut donc prétendre que les scandales de corruption, le fait d’un système lui-même et non de quelques brebis égarées, « c’est derrière nous » ? La partie sur l’application « des principes de bonne gouvernance » est peut-être finalement aussi risible puisqu’elle figure dans tous les discours de l’ex-président déchu Sepp Blatter depuis son entrée en fonctions.

Pas besoin d’un tortionnaire à la tête du foot mondial

Donc, Gianni Infantino a été élu neuvième président de la Fédération internationale de football association (Fifa). Il a remporté le scrutin dès le deuxième tour avec 115 des 209 voix, devançant le cheikh Salman, membre de la famille royale de Bahreïn et, à ce titre, accusé par des ONG d’avoir trempé dans la répression du « printemps arabe » local en 2011. Les grands électeurs de la Fifa ont sans doute été apeurés de nouvelles révélations et scandales en perspective. Pas besoin d’un tortionnaire à la tête du foot mondial. Alors, ils ont fait le choix de la sécurité. Et quel plus sûr choix qu’un technocrate valaisan, n’est-ce pas ? Outre qu’ils sont nés à dix kilomètres de distance, mais à trente-quatre ans d’intervalle, Gianni Infantino, 45 ans, présente le même profil que Sepp Blatter : il est un pur produit de l’appareil, il a grandi politiquement dans l’ombre du « président » (Havelange pour l’un, Platini pour l’autre) avant de profiter des circonstances de l’histoire et des liens tissés pour devenir calife à la place du calife. De la même manière qu’en politique, la voie royale pour devenir député ou ministre semble consister à être d’abord directeur de cabinet ou conseiller plutôt que militant…
Infantino ne serait jamais devenu président de la Fifa si Michel Platini n’avait pas été suspendu. À peine l’ancien triple ballon d’or rencontrait-il des problèmes avec la justice que le juriste suisse annonçait sa candidature rendant, selon les témoignages, « fou de rage » son patron. Vendredi, il a fallu attendre la conférence de presse pour qu’Infantino-Brutus dise avoir une « très forte pensée » pour Platini-César, sans préciser toutefois de quelle nature elle était. Pas un mot lors de son discours d’intronisation…
En revanche, le nouvel élu a rassuré son monde : la crise est terminée, les leçons ont été tirées, de nouvelles règles adoptées. En guise de réformes, l’ensemble des mesures adoptées vendredi avant l’élection du nouveau « pape » relève de réformettes (limitation de l’exercice d’un mandat à douze ans mais refus d’une limite d’âge, création de comités de contrôle, séparation des fonctions « politiques » et commerciales) et de pétitions de principe (meilleure reconnaissance du rôle des femmes dans le football, « contrôle renforcé des flux d’argent », « principes universels de bonne gouvernance »). Mais le nœud gordien n’a pas été tranché : ce sont les mêmes personnes, exactement les mêmes, qui attribuent les compétitions et qui ensuite gèrent leur commercialisation.
Si Gianni Infantino croit réellement et sincèrement que la crise, « c’est derrière nous », il se trouvera peut-être une personne bien intentionnée pour lui livrer cette confidence : une autre crise couve toujours et elle finira bien par éclater, celle sur les conditions d’attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar. Comme le lui a souhaité, non sans malice et vice, Sepp Blatter dans une lettre ouverte : « Bon courage ».
À peine élu, Gianni Infantino est déjà de sortie. Le nouveau président de la Fifa, Gianni Infantino, a fait sa première sortie officielle, hier matin, en inaugurant le musée de la Fifa à Zurich, en Suisse, une initiative due à son prédécesseur déchu, Sepp Blatter, suspendu pour six ans. « C’est un très beau musée qui reflète l’universalité du football. C’est une très belle idée de Sepp Blatter, un musée dont il a initié la création », a commenté Infantino. Le musée de la Fifa, installé dans le centre-ville de Zurich, a nécessité 128 millions d’euros d’investissement. Officiellement… Il a pour objectif d’accueillir 250 000 visiteurs chaque année.

Un Richard III en porcelaine, ou la kermesse du pouvoir

Un Richard III en porcelaine, ou la kermesse du pouvoir

Marie-José Sirach
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Dans un décor de pacotille où l’on tue par amusement, Richard III est seul maître à bord.
Photo :Tristan Jeanne-Valès
Jean Lambert-Wild, qui dirige le Théâtre de l’Union à Limoges, a créé une version aussi extravagante que loufoque de l’œuvre de Shakespeare. Il fait du roi maudit, héros noir par excellence, un clown blanc inquiétant dans une fête foraine.
Limoges (Haute-Vienne), envoyée spéciale.  Ce doit être l’époque qui veut ça. Des temps politiques incertains, jeux de pouvoir troubles parsemés d’éclats de trahisons comme autant d’obus balancés sur l’ennemi autrefois allié. Cet été, Thomas Ostermeier avait présenté au Festival d’Avignon un Richard III néopunk porté par un Lars Eidinger électrique. Il y a peu, à l’Odéon, ce fut au tour de Thomas Jolly de s’attaquer à la pièce de Shakespeare avec moins de réussite. Qu’allait donc faire Jean Lambert-Wild de ce personnage fascinant, bossu, boiteux, revanchard sanguinaire, veule, cruel, meurtrier, avide de pouvoir ?

La mise en scène de Lambert-Wild est fascinante

Un personnage de foire, un clown blanc, grimé, un col fraise, le sourcil en pointe. Un personnage familier et étrange, troublant, dont la voix vrille au fur et à mesure que sa folie l’emporte. Face à lui, ou avec lui, partenaire de jeu et de je virevoltant d’un personnage l’autre, Élodie Bordas, son double, son alter ego, son auguste sans fard, son miroir sans tain qui le renvoie à sa propre déchéance. Richard III est mauvais comme une teigne. Il ne craint pas la mort, se sachant lui-même condamné par le tribunal des hommes. Mais il détient l’intelligence, arme d’une redoutable efficacité face à l’adversité médiocre. Richard III tue, dégomme ses adversaires comme dans un jeu de chamboule-tout géant, un jeu de massacre où à tous les coups il gagne. Dans un décor conçu comme une Foire du trône avec ses attractions et ses couleurs à la fois chaudes et criardes, les fils de la reine Elizabeth sont des bouches animées par une roue avec stroboscope ; Clarence, son frère, un ballon de baudruche explosé par une fléchette ; le roi Edouard, un coucou suisse ; les enfants de Clarence, deux poupées ensanglantées ; les jeunes princes d’York, des barbes à papa…
La mise en scène de Lambert-Wild est fascinante, qui se joue de cette ambiguïté, à la fois attirante et répulsive, avec des cassures de rythme et des envolées poétiques féeriques. Les deux acteurs, leur complémentarité, leur complicité font des étincelles. Élodie Bordas se révèle une partenaire incroyable, un double, à la fois ombre et lumière d’un Jean Lambert-Wild/Richard III facétieux et inquiétant. On salue l’originalité du parti pris, une partition musicale pour piano mécanique qui fait corps avec le jeu des acteurs, des incises technologiques au service du jeu elles aussi (et pas des subterfuges pour tromper l’ennui). Lorsque Richard III revêt son armure de porcelaine conçue par deux maîtres artisans, Stéphane Blanquet et Christian Couty, on est bluffé. Pour un peu, on applaudirait, comme à la fête foraine… Dans ce décor de pacotille où l’on tue par amusement, où l’on rit jaune devant un tel amoncellement de cadavres, Richard III est seul maître à bord, un maître de cérémonie de la cruauté du monde où il pleut des confettis et des cadavres, pauvres pantins désarticulés qu’il manipule à satiété. Richard III se regarde dans le miroir et c’est notre lâcheté qui s’y reflète. Alors, quand la roue de l’histoire s’accélère et que Richard en connaît l’issue, ce retournement de l’histoire dont il a seul l’intuition, toute la mécanique s’enraye dans un tourbillon impressionnant.
Shakespeare est là, qui nous rappelle la triste comédie du pouvoir. La symbolique de ces meurtres se retrouve aujourd’hui dans cet immense bal de faux-culs où évoluent les dirigeants du monde. Là, tu joues dans la cour des grands. Le lendemain, te voilà banni. Ici on s’offusque de la guerre mais on refourgue en douce les armes. Richard est l’incarnation absolue du mal mais aussi toutes les fêlures contenues en nous. C’est pour ça qu’il nous fascine, nous aimante, nous révulse. Il est une part de notre humanité flétrie, piétinée quand plus rien ne fait civilisation.
Le spectacle a été créé à Limoges du 19 au 29 janvier. Tournée : du 1er au 11 mars au Volcan du Havre ; les 22 et 23 mars à l’Espace Legendre, à Compiègne ; les 9 et 10 avril, à la Ferme du Buisson, à Marne-la-Vallée ; du 10 au 14 mai, à Monthey, en Suisse ; du 24 au 26 mai, l’Apostrophe, à Cergy-Pontoise, et du 3 novembre au 4 décembre, au Théâtre de l’Aquarium, la Cartoucherie.

Notre-Dame-des-Landes. Un référendum en questions

Notre-Dame-des-Landes. Un référendum en questions

Marie-Noëlle Bertrand
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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À pied ou à vélo, à la périphérie de Nantes, samedi, les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont de nouveau manifesté aux abords du site projeté pour la réalisation de la structure.
Photo : Jean-Sébastien Évrard/AFP
Les opposants au projet d’aéroport ont manifesté samedi. Après l’annonce d’une consultation, sa pertinence continue de faire débat.
Ils veulent croire en leur victoire, mais ne tombent pas d’accord quant à la stratégie à suivre pour la remporter : les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont de nouveau manifesté, samedi, en périphérie de Nantes. Quinze mille personnes selon la police, le triple selon les organisateurs, se sont retrouvées à pied ou à vélo sur la voie rapide, aux abords du site projeté pour la réalisation de la structure. « Cette manifestation est importante pour montrer aux politiques que nous sommes les plus nombreux », lançait un porte-parole de la Coordination des opposants, dans une allusion au référendum annoncé par François Hollande, le 11 février dernier. Censée aider à trancher ce dossier vieux de plus de vingt ans, la démarche continue de confronter les avis, y compris chez les manifestants.
Il y a ceux qui, comme Ronan Dantec, non seulement l’approuvent, mais la revendiquent. « Je défends l’idée d’un référendum depuis quatre ou cinq ans et je l’ai portée auprès de François Hollande à plusieurs reprises », explique le sénateur EELV de Loire-Atlantique, qui manifestait ce samedi, dans un entretien accordé le même jour au journal Presse Océan. « L’État n’a jamais joué franc jeu sur ce dossier, en fournissant des études fantaisistes ou bâclées. Le référendum lui offre l’occasion de remettre les compteurs à zéro. » Et de plaider pour « une tierce expertise, confiée à un cabinet international indépendant ».
Et il y a ceux qui ne sont plus prêts à faire confiance au gouvernement. « On ne peut pas organiser un référendum sur la base d’un dossier tronqué… », note Willem, éleveur laitier de 28 ans, récemment installé sur la ZAD (zone d’aménagement différé, rebaptisée zone à défendre). En cause, dans les paroles du jeune homme : une étude sur l’utilité économique du projet d’aéroport portée à l’enquête publique en 2007, et que les associations disent avoir eu toutes les peines à obtenir. « Il a fallu saisir la commission d’accès aux documents administratifs (Cada) pour finir par avoir une synthèse parcellaire de cette étude », déplore Françoise Verchère, coprésidente du Collectif des élus doutant de la pertinence de l’aéroport (Cedepa). Au final, les résultats que celle-ci avance sont contestés par les organisations d’opposants.

« Au final, des gens qui risquent de voter pour ou contre la ZAD… »

Plus globalement, celles-ci redoutent que le référendum ne soit biaisé, et que la question des alternatives au projet ne soit noyée dans le contexte. « Au final, les gens risquent de voter pour ou contre la ZAD… », souligne-t-on. Reste, quoi qu’il en soit, toujours la même question : partisans ou opposants au projet d’aéroport seront-ils prêts à entendre la réponse au référendum, quelle qu’elle soit ? Beaucoup en doutent. De fait, la légitimité démocratique de la démarche se voit sévèrement attaquée. Par les opposants au projet, donc, mais également par ses partisans. Cette décision présidentielle « bafoue la parole portée par trois présidents de la République, six premiers ministres, (deux) régions, (deux) départements, (quatre) agglomérations, et porte un sérieux coup à la légitimité des élus locaux et de l’État », réagissait ainsi, peu après l’annonce, Alain Mustière, président de l’association Des ailes pour l’Ouest, chaudement partisane du projet. On voit mal, dans ces conditions, comment les uns ou les autres pourront admettre la validité de la démarche et de son résultat.

Zika : nouveau cas en métropole

Zika : nouveau cas en métropole

santé
Mehdi Fikri
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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La ministre Marisol Touraine, vendredi, en Martinique, où l’on recense près de 7 600 cas de personnes infectées.
Photo : AFP
Une première transmission par voie sexuelle de ce virus dangereux pour les femmes enceintes a été répertoriée en France.
La propagation du virus Zika s’accélère de manière inquiétante. Pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il s’agit d’« une urgence de santé publique de portée mondiale ». Transmis par des moustiques, comme la dengue ou le chikungunya, ses symptômes sont sans réelle gravité : fatigue, fièvre, éruption cutanée, douleurs musculaires et articulaires, conjonctivite, maux de tête. Dans 80 % des cas, les malades sont même asymptomatiques. Néanmoins, les femmes enceintes sont très exposées. Le Zika pourrait provoquer chez les fœtus des troubles neurologiques, des malformations congénitales, les microcéphalies et le syndrome de Guillain-Barré, cette maladie du système nerveux.
En France métropolitaine, le virus Zika a été récemment transmis pour la première fois par voie sexuelle, et non par une piqûre de moustique, a confirmé, samedi, Marisol Touraine, la ministre de la Santé. Il s’agirait d’une femme qui n’est pas enceinte et qui a été contaminée par son compagnon revenant du Brésil. Selon le ministère de la Santé, la femme se porte bien et il n’a pas été jugé nécessaire de l’hospitaliser.
Pour l’instant, seulement une poignée de cas ont été répertoriés en Europe, dont cinq en France métropolitaine. En revanche, la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, où Marisol Touraine était en déplacement, sont particulièrement touchées. La Martinique, en premier lieu, avec près de 7 600 personnes infectées, suivie par la Guyane (790 cas) et la Guadeloupe (389 cas). Près de 3 à 4 millions de malades sont attendus sur tout le continent américain en 2016. La progression du Zika semble particulièrement forte au Brésil.

L’OMS accélère la recherche de vaccins et de traitements

Montrée du doigt pour son manque de réactivité lors de l’infection d’Ebola, l’OMS a décidé de lutter très activement contre cette nouvelle épidémie en accélérant la recherche de vaccins, de traitements et d’instruments de diagnostics contre le Zika. En parallèle, la surveillance des microcéphalies et des syndromes de Guillain-Barré sera renforcée dans les pays touchés par le virus. Jusqu’ici, l’OMS n’a pas encore envisagé de restrictions sur la circulation entre pays.
Les principales inquiétudes concernent les femmes enceintes. Des doutes subsistent mais il est très vraisemblable que le virus Zika provoque des dysfonctionnements cérébraux chez le fœtus pouvant aller jusqu’à une mort in utero ou peu après la naissance. Ces anomalies prennent notamment la forme de microcéphalies, une atrophie du cerveau s’apparentant à des lésions cérébrales. La microcéphalie est une manifestation très rare, et la multiplication par 20 du nombre de cas au Brésil n’a pas manqué d’alerter les autorités.
En France, la ministre de la Santé déconseille aux femmes enceintes de se rendre dans les zones touchées. Un centre spécialisé à été ouvert à l’hôpital Necker à destination des femmes enceintes s’inquiétant de leur santé. De son côté, le Haut Conseil de santé publique (HCSP) propose la mise en place « d’un système de surveillance et d’alerte spécifique à la détection d’anomalies congénitales, neurologiques ou non ».

PSA : une générosité en trompe-l’œil

PSA : une générosité en trompe-l’œil

Loan Nguyen
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Photo : AFP
En dépit de son discours sur le partage des profits, le constructeur n’augmentera finalement ses ouvriers que de 0,6 % après trois ans de gel des salaires.
Derrière les effets d’annonce, la baudruche du discours social de PSA se dégonfle. Quelques jours à peine après avoir clamé redistribuer 2 000 euros d’intéressement à l’ensemble de ses salariés – ce qui n’était en soi pas grand-chose par rapport aux 1,2 milliard d’euros de profits réalisés par le groupe en 2015 –, les velléités de partage des richesses du constructeur semblent déjà bien loin. « La majorité des salariés vont toucher le minimum fixé à 1 711 euros brut. La direction vient de le relever à 1 812 euros brut, ce qui fait 1 665 euros net », souligne la CGT dans un communiqué, qui ajoute que la prime de 450 euros reversée aux salariés au titre de la réforme des retraites chapeaux est incluse dans ce montant.
À l’occasion des négociations salariales de Peugeot-Citroën, la direction a proposé jeudi une augmentation royale de 0,6 % alors que les salaires ont été bloqués pendant trois ans, en vertu d’un accord de compétitivité signé en 2013 par la CFE-CGC, la CFTC, FO et le SIA. Rien de très étonnant en période d’austérité généralisée. Sauf que, cette fois, la direction aurait mis la pression aux syndicats pour signer dès la deuxième réunion. « Si une majorité de syndicats signaient sur-le-champ, la direction proposait une augmentation générale pour les ouvriers de 0,6 % avec un talon de 8 euros net par mois et zéro pour les techniciens. Dans le cas contraire, une proposition plus faible serait appliquée : pour les ouvriers 0,2 %, soit 3 euros net pour un salaire net de 1 500 euros et zéro pour les techniciens », révèle la CGT, qui dénonce un véritable « chantage ».

Privés d’augmentation de salaire

Seconde innovation antisociale de ce cru 2016 des négociations salariales chez PSA, les techniciens et agents de maîtrise (TAM) sont alignés sur le régime d’augmentation des cadres, donc privés d’augmentation générale de salaire et soumis uniquement à des augmentations individuelles. « C’est le mérite qui va être mis en avant » aussi pour les TAM, avec des augmentations individuelles égales à 1,25 % de la masse salariale, comme pour les cadres, a estimé Christian Lafaye (FO) à l’AFP. À ce stade, quatre organisations syndicales (CFE-CGC, CTFC, FO, GSEA) ont signé l’accord, la CFDT ne s’étant pas encore prononcée. « Cet accord majoritaire traduit la qualité et la maturité du dialogue social chez PSA, atout indispensable pour la performance de l’entreprise », s’est targuée la direction du groupe dans un communiqué, célébrant « une politique salariale équilibrée qui concilie les intérêts des salariés et les impératifs de performance du groupe, ceci afin de protéger l’entreprise dans un environnement instable ».

Valls contraint de renationaliser le RSA

Valls contraint de renationaliser le RSA

Solidarité
Gérald Rossi
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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« C’est une première avancée », note Christian Favier, président du conseil départemental (PCF ) du Val-de-Marne.
Photo : Jean-Claude Moschetti/REA
Le premier ministre a annoncé le retour du financement du revenu de solidarité active dans le giron de l’état dès 2017. Une allocation qui pèse lourdement dans les budgets des départements depuis 2009.
Une éclaircie se dessine pour les budgets des départements. En fin de semaine dernière, devant une délégation de l’Assemblée des départements de France (ADF), le premier ministre a confirmé ce qui était évoqué avec de plus en plus d’insistance dans les couloirs, à savoir un retour dans le giron de l’État du financement total du RSA dès 2017. Ce qui n’aura pas d’incidence pour les bénéficiaires de ce revenu de solidarité active payé par les caisses d’allocations familiales (CAF).
Depuis le transfert du RMI devenu RSA aux collectivités départementales en 2009, la part de financement de l’État n’a cessé de reculer pour ne plus représenter que les deux tiers de la somme globale. Au fil des ans, les conseils généraux (désormais départementaux) ont donc inscrit dans leurs budgets des sommes de plus en plus importantes, alors que les compensations de l’État ne suivaient plus et que le nombre d’allocataires augmentait, du fait de la persistance de la crise.
Tant et si bien qu’une aide financière d’urgence de 50 millions d’euros a dû être débloquée par l’État en 2015, pour une dizaine de départements ne pouvant pas boucler leur budget. Pour 2016, « une quarantaine de départements seront concernés », précise l’ADF, qui indique que « le chiffre de 200 millions d’euros a été évoqué lors de la réunion à Matignon ». Sans que Manuel Valls confirme la somme.

Les ressources des départements ne seraient pas amputées

Avec l’annonce d’une recentralisation du RSA, « nous sommes encore loin du compte mais c’est une première avancée appréciable à mettre à l’actif des mobilisations des départements et des populations », se réjouit le sénateur (PCF) Christian Favier, président du conseil départemental du Val-de-Marne. Dans ce département, où 27 000 habitants ont pétitionné pour réclamer à l’État des moyens nécessaires à la hauteur des missions menées au service des populations, « l’enjeu s’élève à 40 millions d’euros pour équilibrer notre budget 2016, somme qui s’ajoute aux 27 millions de ponction sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) au titre du financement du CICE », souligne Christian Favier.
Stéphane Troussel, président (PS) du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, parle lui aussi d’« avancées », tout en notant que « les modalités d’application ne peuvent pas avoir pour conséquence de figer les inégalités territoriales que nous combattons ». Car toutes les inconnues ne sont pas levées. Des points cruciaux doivent être négociés : le calendrier de la réforme et l’année de référence, qui pour l’ADF « ne peut être postérieure à 2014 », a expliqué le président des départements, Dominique Bussereau. Dans son costume de président (LR) de Charente-Maritime, il avait promis en janvier « une guerre totale avec l’État » sur le sujet. Actuellement, les services du premier ministre planchent sur l’année 2016 comme point de référence…
Pour l’heure, il semblerait que les ressources propres des départements ne seront pas amputées par le retour de l’enveloppe RSA dans les services sociaux nationaux. Seule une part de DGF leur serait retirée, correspondant à leur participation. Sans doute le niveau fera-t-il débat tout comme le principe défendu par Manuel Valls selon lequel les départements qui « s’engagent à renforcer l’accompagnement vers l’insertion et l’emploi » seraient mieux traités sur le plan financier.
« Le chemin à parcourir reste long et difficile », pointe encore l’ADF, qui a convoqué pour demain, mardi 1er mars, une assemblée générale extraordinaire.

Irlande. Sévère sanction électorale pour les partis austéritaires

Irlande. Sévère sanction électorale pour les partis austéritaires

Thomas Lemahieu
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Gerry Adams (au centre), le leader du Sinn Féin, fêtait hier sa victoire à Dundalk, où il a été réélu dans sa circonscription du comté de Louth.
Photo : Paul Faith/AFP
Les résultats des législatives signent la défaite du gouvernement sortant. Le Labour, en particulier, qui a appliqué les consignes de la troïka, pourrait ne se retrouver qu’avec une poignée d’élus dans la future assemblée, où le Sinn Féin et le reste de la gauche radicale progressent.
Dublin (Irlande), envoyé spécial.  Les bureaux de vote ont fermé vendredi soir à 22 heures en Irlande et, dimanche, en début de soirée, dans de nombreuses circonscriptions, les opérations d’attribution des sièges, extrêmement laborieuses avec la proportionnelle par préférences transférables, se poursuivaient. Mais une chose est certaine : les partis traditionnels qui ont imposé l’austérité au pays ces dernières années – Fianna Fáil jusqu’en 2011, puis Fine Gael et le Labour – sont plus discrédités que jamais. Au début des années 1980, les frères ennemis conservateurs - héritiers de camps opposés pendant la guerre civile – et les travaillistes dominaient totalement la vie politique irlandaise avec 93 % des votes ; après les législatives de vendredi, leurs scores cumulés culminent à 56,4 %. Si Fianna Fáil, qui a gouverné l’Irlande pendant 80 ans avant d’être sévèrement sanctionné après la crise financière, récupère légèrement avec 24,3 % des premières préférences (contre 17,5 % en 2011), la coalition sortante apparaît comme la grande perdante. Fine Gael, le parti du premier ministre, Enda Kenny, qui avait basé toute sa campagne sur la « reprise » et la « stabilité » politique, est en chute libre : il passe de 36,1 % à 25,5 %. Mais ce sont les travaillistes du Labour qui prennent la claque la plus magistrale : avec 6,6 % des voix (contre 19,5 % en 2011), ils pourraient ne se retrouver qu’avec une poignée d’élus dans la future assemblée. À Dublin, Joan Burton, la patronne du Labour, sauve sa tête de justesse, mais le parti perd 16 autres sièges dans la capitale. Avec la désintégration du parti travailliste, Fianna Fáil et Fine Gael, qui ont mené toute la campagne en excluant vigoureusement cette perspective, paraissent condamnés à tenter de former une coalition totalement inédite en Irlande et, d’après les observateurs, à s’entre-dévorer, laissant le champ libre à une opposition de gauche radicale.

Le Sinn Féin est, avec 25 %, le premier parti pour les jeunes

Dans ce contexte, les regards se tournent vers le Sinn Féin. Le parti républicain, très engagé dans le mouvement contre l’austérité, rassemblé sous la bannière de la coalition Right2Change (Droit au changement), ne réitère pas sa performance des européennes de 2014 (19,5 %), mais, avec 13,8 %, il continue sa progression par rapport aux dernières législatives (9,9 %), malgré les attaques permanentes de la presse dominante et des partis austéritaires. Ses dirigeants comme Gerry Adams ou Mary Lou McDonald écrasent la concurrence dans leurs circonscriptions à Louth et à Dublin centre. Selon un sondage à la sortie des urnes, le Sinn Féin est, avec 25 %, le premier parti pour les jeunes entre 18 et 34 ans, loin devant Fine Gael (20 %). « Notre nombre de députés va augmenter de manière importante, se réjouit Martin McGuinness, vice-premier ministre Sinn Féin en Irlande du Nord, samedi, à Dublin. Avec son programme d’austérité qui a endommagé tout le pays, le gouvernement sortant a été puni. La poussée des partis et des indépendants de gauche doit inciter à sortir de ce programme. Le Sinn Féin, qui s’affirme comme le principal parti à gauche, y veillera pour protéger la société. » Très active dans les luttes contre la taxe sur l’eau courante, la coalition d’extrême gauche – Anti-Austerity Alliance/People Before Profit – réalise de très bonnes performances, avec un transfert important de préférences par les électeurs du Sinn Féin dans les circonscriptions urbaines à Dublin et à Cork, où elle présentait des candidats. « Cela montre bien qu’il y a une aspiration à une véritable gauche qui viendra remplacer le Labour ! » lance Ruth Coppinger, élue de l’Alliance anti-austérité à Dublin ouest.

Le président Rohani sort renforcé des législatives

Le président Rohani sort renforcé des législatives

Pierre Barbancey
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Dès samedi soir, à Téhéran, Hassan Rohani a estimé que le peuple avait « donné plus de crédibilité et de force à son gouvernement élu ».
Photo : Ho/Iranian présidency/AFP
Tout indique que le camp des « réformateurs » est assuré de disposer pour les quatre prochaines années de plus du double de ses 30 députés dans l’actuel Parlement, qui était dominé par les conservateurs.
Téhéran (Iran), envoyé spécial.  Ce n’est qu’aujourd’hui, voire demain, que l’on connaîtra plus précisément la nouvelle composition du Majlis (le Parlement) et celle de l’Assemblée des experts, l’instance religieuse chargée notamment de désigner le guide suprême. Depuis samedi, les rumeurs les plus folles couraient à Téhéran. Via les réseaux sociaux, les informations s’échangeaient, souvent dramatiques. On disait que les conservateurs obtenaient 60 % des suffrages, que les plus durs des experts étaient réélus. On se voulait incrédule. « Pourtant, les gens sont allés voter en nombre, cette fois-ci », faisait remarquer Ahmed, un jeune sociologue, comme pour vaincre sa crainte de voir les durs des durs renforcer leur mainmise sur la société.

Une étape dans une épreuve de force qui s’engage

Ahmed n’avait pas tort si l’on en croit les premiers résultats officiels. Le camp « réformiste » du président iranien, Hassan Rohani, aurait remporté la totalité des 30 sièges de députés en jeu à Téhéran. Le principal candidat conservateur, Gholam-Ali Haddad-Adel, pourrait ainsi perdre son siège. Habituellement, la capitale penche plutôt pour les réformateurs. Mais l’ampleur de cette victoire suggère que le nouveau Parlement pourrait être plus favorable à la politique pragmatique de Rohani. Même tendance pour l’Assemblée des experts. Après le dépouillement de la majorité des bulletins, Rohani et l’ancien président Hachemi Rafsandjani sont en tête du scrutin. À Téhéran, un seul candidat conservateur, Ahmad Jannati, semblait en passe d’être élu à l’Assemblée des experts. Ce qui ne serait pas le cas du président de cette assemblée, Mohammad Yazdi, et de Mesbah Yazdi, que les réformateurs cherchaient à faire battre. Le « triangle de JYM » (Jannati, Yazdi, Mesbah), comme les Iraniens aiment à les désigner, s’est brisé, non sans conséquences politiques. Mais aussi avec une spécificité de ce régime politique, peu remarquée : les différents acteurs politiques, plus que dans tous les pays de la région, veulent obtenir une légitimité populaire, une base sociale qui renforcerait leur théorie politico- religieuse. Le guide suprême plus que tous les autres. Mais, dans le cas de figure actuel, cet aspect serait-il toujours respecté ?
Karim, jeune animateur d’une association que nous avions rencontré la veille des élections (lire l’Humanité du 26 février), évoquait les dangers d’un coup d’État perpétré par les ultraconservateurs. En cas de défaite majeure, comment vont-ils se comporter ? Difficile de le savoir. Néanmoins, Hachemi Rafsandjani a cru bon d’affirmer rapidement sur Twitter : « Personne n’est en mesure de résister à la volonté de la majorité du peuple et tous ceux dont le peuple ne veut pas doivent se mettre en retrait. » Dès samedi soir, Rohani avait estimé que le peuple avait « donné plus de crédibilité et de force à son gouvernement élu ».
Le quotidien réformiste Etemad a titré sur le « ménage au Parlement ». Le journal assure en première page que « le prochain Parlement sera différent de tous les autres Parlements de l’histoire de l’Iran car aucune faction politique n’aura un pouvoir de décision absolu ». Ce qui signifie que ce scrutin n’est qu’une étape dans une épreuve de force qui s’engage dans un contexte national, régional et international qui va peser lourdement jusqu’à l’élection présidentielle prévue en 2017, le tout sur fond d’une possible disparition du guide suprême, Ali Khamenei, dont le remplacement échoit à l’Assemblée des experts.

La Grèce refuse le rôle de souricière pour les réfugiés

La Grèce refuse le rôle de souricière pour les réfugiés

Rosa Moussaoui
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Plus de 7 000 réfugiés étaient bloqués dimanche au poste frontière d’Idomeni, entre la Grèce et la Macédoine.
Photo : Petros Giannakouris/AP
Avec la fermeture des frontières sur la route des demandeurs d’asile vers l’Europe du Nord, 22 000 personnes sont bloquées en Grèce, au risque d’une sérieuse crise humanitaire. À la veille du sommet UE-Turquie du 7 mars, Alexis Tsipras exhorte ses homologues à assumer leurs responsabilités.
L’Europe n’en finit plus de se désagréger, et c’est encore la Grèce qui paye l’addition. Avec les illégales restrictions aux frontières imposées aux demandeurs d’asile par l’Autriche et le long de la route des Balkans, l’« effet domino » tant redouté par Athènes est bien là, faisant courir aux réfugiés bloqués en Grèce le risque d’une grave crise humanitaire. « Selon nos estimations, le nombre de ceux qui seront pris au piège dans notre pays s’établira entre 50 000 et 70 000 personnes le mois prochain », alertait hier le ministre grec en charge de la politique migratoire, Ioannis Mouzalas. Des Îles de la mer Égée jusqu’au passage d’Idomeni, à la frontière gréco-macédonienne, la route de l’Europe du Nord est déjà entravée pour 22 000 hommes, femmes et enfants fuyant la guerre en Syrie, en Irak, en Afghanistan.

Une Europe incapable de définir une stratégie cohérente et collective

Alors que la gravité de cette crise et l’ampleur de l’exode exigeraient de l’Europe cohésion et solidarité, ce sont au contraire les logiques du chacun pour soi, des murs et du repli national qui prévalent, précipitant les initiatives unilatérales, accélérant le mouvement de fermeture des frontières. La semaine dernière, après la décision de l’Autriche de ne plus accepter qu’au compte-gouttes les demandeurs d’asile et de resserrer le passage des exilés en transit vers l’Allemagne, le ton est monté, au point qu’Athènes, fait inédit, a rappelé pour consultations son ambassadrice à Vienne. Samedi, la Commission européenne dénonçait la décision de Budapest d’organiser un référendum sur le plan européen de « relocalisation » des demandeurs d’asile entériné le 22 septembre 2015 par les ministres de l’Intérieur de l’UE malgré l’opposition de la Slovaquie, de la Roumanie, de la Hongrie et de la République tchèque. « Nous ne comprenons pas comment ce référendum s’intégrerait au processus de décision accepté par tous les États membres, y compris la Hongrie, dans le cadre des traités », a réagi Natasha Bertaud, porte-parole de la Commission. Le même jour, la Belgique était elle aussi la cible d’un rappel à l’ordre européen, après sa décision de rétablir temporairement les contrôles à sa frontière avec la France, par crainte d’un afflux de réfugiés en provenance de Calais. Peine perdue, depuis l’été 2015, une dizaine d’États membres de l’espace Schengen ont rétabli des contrôles à leurs frontières. Décisions prises en ordre dispersé, souvent sous la pression de formations d’extrême droite qui ne se privent pas de souffler sur les braises de la peur et du rejet de l’étranger. Jeudi, à Bruxelles, les ministres de l’Intérieur de l’UE ont donné le spectacle pathétique d’une Europe cédant à la panique, incapable de définir une stratégie cohérente et collective pour surmonter la crise et accueillir les demandeurs d’asile avec dignité et humanité. « Nous ne pouvons pas continuer à agir par des actions unilatérales, bilatérales ou trilatérales », a prévenu le commissaire européen en charge des affaires intérieures et de la migration, Dimitris Avramopoulos, en s’alarmant du « risque que le système s’effondre complètement » à très court terme.
La Grèce, elle, refuse de payer seule l’addition de cette implosion de la zone Schengen. S’exprimant devant la Vouli, le Parlement grec, le premier ministre grec, Alexis Tsipras, a dénoncé la semaine dernière avec une certaine amertume la politique du « deux poids, deux mesures » dans l’application des décisions prises à Bruxelles. Allusion claire à l’étroite surveillance dont Athènes fait l’objet depuis le sommet européen du 12 juillet 2015 qui a imposé aux Grecs un troisième mémorandum d’austérité. « La Grèce ne peut qu’exiger à partir de maintenant de ses partenaires qu’ils se comportent de façon responsable, comme nous le faisons face à une crise qui fait supporter à un petit pays un fardeau disproportionné. Nous avons fait et ferons tout ce qui est en notre pouvoir afin d’apporter aide substantielle, chaleur, humanité, sécurité à des populations traquées et déracinées. Et nous serons les premiers, comme nous le sommes aujourd’hui, à mettre en application nos engagements tant vis-à-vis des réfugiés que vis-à-vis de nos partenaires », a expliqué Tsipras. Mais, a-t-il insisté, « la Grèce ne consentira, à partir de maintenant, à aucun accord tant que la répartition obligatoire des charges et des responsabilités entre les États membres ne sera pas réglée. Il est exclu que nous acceptions que des pays construisent des clôtures et des murs tout en refusant d’héberger ne serait-ce qu’un seul réfugié ».

Berlin veut sous-traiter à Ankara le tri des réfugiés

En menaçant d’user de son veto, le chef du gouvernement grec entend dénoncer les pressions exercées sur la Grèce à la veille du sommet UE-Turquie du 7 mars qui doit se pencher sur la crise des réfugiés. Une rencontre voulue par Berlin, après la signature en novembre dernier d’un « plan d’action commun » pour limiter l’arrivée de réfugiés en Europe. En échange de sa coopération pour endiguer l’exode, Ankara s’était vu offrir une « assistance humanitaire européenne » de 3 milliards d’euros, ainsi que la promesse de réactiver le processus d’adhésion de la Turquie à l’UE. Il s’agirait, désormais, de négocier avec le président Erdogan la possibilité, pour les patrouilles de Frontex et celles de l’Otan déployées en mer Égée, la possibilité de refouler les réfugiés vers la Turquie. Berlin plaide aussi pour l’expulsion de demandeurs d’asile déjà présents sur le sol européen. En contrepartie, 100 000 à 250 000 réfugiés seraient « prélevés » chaque année en Turquie pour être « réinstallés » dans des pays européens « volontaires ». Dans cette configuration, la Grèce ferait figure de vaste camp, d’antichambre de l’Europe dédiée au tri d’êtres humains poussés à l’exil, dans une logique que préfigurent déjà les « hotspots » imposés par Bruxelles.
Angela Merkel joue ici la carte de l’ambiguïté et du calcul électoral, à la veille d’échéances régionales à hauts risques pour son parti, la CDU, menacé par la montée de l’extrême droite. Si la chancelière allemande répète vouloir « garder la porte ouverte », l’initiative autrichienne réduit de fait le flux de réfugiés en direction de l’Allemagne. Et, dans l’actuelle cacophonie européenne, c’est Berlin qui tirerait le bénéfice politique d’un éventuel accord avec Ankara, le 7 mars. Quitte à piétiner le droit international : la convention de 1951 relative au statut de réfugié et son protocole additionnel de 1967 interdisent le tri des réfugiés, les expulsions collectives et l’établissement de quotas de demandeurs d’asile.

Élevage. Après la bronca, le silence grinçant

Élevage. Après la bronca, le silence grinçant

Marie-Noëlle Bertrand
Lundi, 29 Février, 2016
L'Humanité

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Les coopératives ? "Elles sont pires que les industriels privés." Les syndicats ? "Pfff..." La FNSEA ? "Elle est complice de tout ça." Les politiques, alors ? " Rires.
Photo : Dominique Faget/AFP
Salon de l’agriculture. Dans le sillage du chef de l’État, samedi, des éleveurs disent leurs désillusions à l’égard d’un secteur qui se disloque.
Une pelote de gardes du corps qui déboulent du hall 1 – celui de l’élevage – et tracent à grands pas vers le 2 – celui du végétal –, chassant comme des mouches, de leurs bras écartés et nerveux, quiconque se trouve sur le passage. Une presse audiovisuelle qui suit l’escadron en trottant, micros emmoumoutés tressautant au rythme des foulées saccadées des journalistes. Et dernière la nuée, un silence grinçant, encore chargé des huées qui, quelques minutes plus tôt, emplissaient le bâtiment aux bestiaux. Il est tout juste 8 heures, ce samedi matin, le Salon de l’agriculture n’a pas encore ouvert ses portes au public. François Hollande file de l’espace où exposent les éleveurs pour poursuivre sa visite en des lieux plus sereins, après avoir écopé, au petit jour, d’un accueil particulièrement épicé. « J’avais dix ans quand je suis venu ici pour la première fois, c’était dans les années 1960 », note Gérard, dans le calme qui revient à mesure que le sillage de tumulte se referme derrière le président de la République. « Eh bien, en plus de quarante ans de Salon, je n’avais jamais vu ça. » Derrière lui, des prim’holstein blanc et noir, aux croupes anguleuses et aux mamelles taillées pour faire du lait en masse, ont repris leurs ruminements, l’air de rien. Celles-ci viennent du grand Est. Gérard et les quelques éleveurs restés à discuter dans l’allée E aussi. Il y a là Francis, Albert, Antoine et Joël, des routards dans le métier. Il y a aussi Cyrille, qui compte s’installer en juin, et Guillaume, qui, du haut de ses 13 ans, persiste à imaginer son avenir dans le lait. Tous ont revêtu le tee-shirt du moment, le noir, aux slogans lapidaires : « Élevage français – État d’urgence » ou « Je suis éleveur, je meurs ».

Ils avaient prévu de tourner le dos au président et à Stéphane Le Foll

« Franchement, c’était une provocation de venir ici », reprennent les hommes, comme désolés de cette idée qu’a eue François Hollande. Eux n’ont pas lancé de jurons au président, ni revendiqué sa démission, comme d’autres l’ont fait bruyamment. Ils avaient en revanche prévu de lui tourner le dos, à lui et à Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, au moment où les deux hommes passeraient à leur hauteur. Ils n’ont finalement pas pu le faire, la bronca les a pour ainsi dire rendus invisibles. Et laissés sur leur faim. « S’ils avaient été courageux, reprennent-ils, ils seraient venus en journée, avec le public pour nous entendre. » Entendre les éclats de colère bien sûr. Et derrière, les cris de détresse plus subtils, faits d’incompréhension, de craintes, de regrets et de désillusions. « Vous savez, aucun éleveur ici ne peut dire combien il va toucher à la fin du mois. Le prix auquel nous vendons notre lait, nous le découvrons six semaines après, quand la laiterie nous envoie notre paye. » Les dernières ne sont pas florissantes – 270 euros la tonne en moyenne, pour un coût de production qu’ils jaugent à 300 euros. Déjà, on les a prévenus que les douze prochains mois seraient à l’avenant. Si cette descente des prix n’est pas la première qu’ils essuient, elle s’annonce sans nul doute la plus longue, avec cette saillie en prime, que le secteur n’est pas le seul touché. « Plus aucune production ne dégage de revenu », lance un des gars debout en rond dans l’allée. « Moi, je suis en polyculture. Avec quatre associés, je fais du lait, de la viande et du blé. » Le prix de ce dernier a chuté de 30 % cette année. « Je ne peux plus m’appuyer sur rien. J’ai fait le calcul : je me paye à 1,50 euro de l’heure. »
La faute à qui, à quoi ? À tout. Aux mises aux normes, qui leur demandent toujours plus d’investissements ; aux industriels laitiers qui font la pluie et le beau temps sur le prix ; aux charges qui augmentent, de partout. « Le mécano qui s’occupe de mon matériel est passé de 52 euros de l’heure l’an dernier à 54 euros cet été et à 56 euros cet hiver », note-t-on à la droite du cercle. « Eux aussi ont moins de boulot, alors ils blindent les prix », commente-t-on à la gauche.
Et puis il y a le système. Celui dans lequel tout monde a mis un pied, puis deux, pour finalement s’y plonger complètement, sans même imaginer risquer de s’y noyer. « C’était les années Chirac. On nous disait : “Produisez ! Produisez !” Et nous, le monde agricole… on a laissé faire. On n’a pas su se prendre en main, s‘organiser. » Les coopératives ? « Elles se comportent pire que les industriels privés. » Les syndicats ? « Pfff… La FNSEA… elle est complice de tout ça. » Les politiques, alors ? Rires. Juste cela. Rires. Puis, tout de même : « Cet été, ils nous ont promis un lait à 340 euros la tonne… On en est où de tout ça ? » Le cercle s’anime : « François Hollande ne peut pas tout, il y a l’Europe… » ; et en face : « D’accord, mais le Cameron, en Grande-Bretagne, comment fait-il ? Pourquoi les nôtres baissent-ils toujours le pantalon ? » Silence. Avant de reprendre. « Faire du volume, ça fait chuter les prix sur le marché. » Silence. « Mais pour nous, c’est devenu la seule façon de s’en sortir. Personne ne voit la porte pour sortir de ce cercle vicieux. » Certains trouvent la leur violemment. « Il y a encore eu ce frère et sa sœur de Normandie qui se sont pendus, l’autre jour… » Silence. Beaucoup d’autres, dit-on, mettront la clé sous la porte avant la fin de l’année. Inquiets d’en être ? Silence.

Report de la présentation de la loi El Khomri sur le code du travail

Report de la présentation de la loi El Khomri sur le code du travail

Lundi, 29 Février, 2016
Humanite.fr

Manuel Valls a officiellement annoncé le report de la présentation de la loi Travail en conseil des ministres d'une quinzaine de jours". Une première victoire pour ses opposants.
Le projet de loi Travail qui devait être présenté en conseil des ministres le 9 mars, journée de mobilisation, sera repoussé d'une quinzaine de jours. "Il faut lever un certain nombre d'incompréhensions, il faut expliquer, répondre à toute une série de fausses informations qui sont données sur ce texte. Donc, nous allons nous donner quelques jours supplémentaires avant le passage en conseil des ministres, une quinzaine de jours sans doute, ce qui ne change pas grand-chose par rapport au calendrier parlementaire initial qui était prévu", a déclaré depuis le Salon de l'Agriculture le Premier ministre, qui a nié tout recul: "Le recul, ce serait abandonner le texte".
"Ce recul gouvernemental est en effet à mettre au crédit de la cyber-mobilisation, des convergences sur le front syndical, des organisations de la jeunesse, de l'évolution du débat à gauche pour une indispensable -clarification-" a réagi Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF. "Valls doit aller "au bout" avec le retrait pur et simple du projet de loi El Khomri. On peut l'y aider en portant dès cette semaine la pétition citoyenne au million de signataires, en faisant converger les luttes et les mobilisation et en écrivant tous ensemble le code du travail du nouveau siècle, celui de l'émancipation et de nouveaux droits et pouvoirs pour les salariés, avec les moyens de son application."
De son côté Eric Coquerel, coordinateur politique du Parti de gauche, a qualifié ce report de "première reculade", rappelant la mobilisation prévue le 9 mars. "Un report de 15 jours est une 1ère reculade de #valls : poussons jusqu'au retrait de la #loielkhomri. Le 9/3 on mobilise ! #OnVautMieuxQueCa".
Dimanche soir, la CFDT, avait jugé "irréaliste" la présentation du texte le 9 mars prochain, et appelé explicitement à un report de l'examen de ce projet de loi "totalement déséquilibré" à ses yeux.  "Le gouvernement a pu aisément comprendre cette dernière semaine que ce texte suscitait le désaccord de beaucoup de monde et de toutes les organisations syndicales", a dit le secrétaire général de la confédération, Laurent Berger, sur France 5.  "Plutôt que de s'obstiner à présenter ce texte en conseil des ministres le 9 mars et de voir ensuite des mobilisations - parce que je le dis, si ce texte devait rester en l'état, la CFDT se mobiliserait contre certaines parties de ce texte - donc plutôt que de faire ça, il faut repartir sur une concertation".
Une première victoire pour les opposants, qui, à l'exception de la CFDT, continuent à demander le retrait total du texte. La mobilisation du 9 mars est maintenue.

"Pourquoi j'ai quitté le cabinet El Khomri"

"Pourquoi j'ai quitté le cabinet El Khomri"

Propos recueillis par Cyprien Boganda, humanité-dimanche
Lundi, 29 Février, 2016
Humanite.fr

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Photo : capture d'écran Dailymotion
Proche conseiller de la ministre du Travail, Pierre Jacquemain a choisi de claquer la porte mi-février, pour marquer son désaccord avec le projet de loi El Khomri. Pour la première fois, ce jeune homme issu de la gauche radicale (il a été collaborateur de Clémentine Autain), raconte les raisons de sa démission.
Quel poste occupiez-vous auprès de la ministre du Travail ?
Pierre Jacquemain : J’étais en charge de sa stratégie publique: je préparais ses discours et ses entretiens avec la presse. J’étais sa « plume », si vous voulez... J’ai été recruté par Myriam El Khomri en mai 2015, à l’époque où elle était secrétaire d’Etat chargée de la politique de la Ville. C’est une militante de gauche que j’ai toujours respectée. Elle a fait un excellent travail en tant que secrétaire d’Etat, elle s’est battue pour obtenir des arbitrages favorables et mener une politique digne de ce nom. C’est pourquoi lorsque, trois mois plus tard, elle m’a proposé de la suivre au ministère du Travail, je n'ai pas hésité. C’est un beau ministère, qui s’est malheureusement détourné de sa mission première : défendre les salariés, dans un contexte économique troublé. Au départ, je pensais que je serai utile.
À quel moment avez vous déchanté ?
Pierre Jacquemain: J’ai peu à peu compris que nous perdions la bataille. En réalité, la politique du ministère du Travail se décide ailleurs, à Matignon. C’est le Premier ministre qui donne le ton. Après le rapport Combrexelle, Myriam El Khomri avait pourtant une grande ambition. Elle a mené une concertation fructueuse avec les partenaires sociaux, qui a débouché sur de réelles avancées. Malheureusement, aucune de ces avancées n’apparait dans le projet de loi final. Le compte personnel d’activité n’est qu’une coquille vide, qui n’est que l’agrégation de droits sociaux déjà acquis. Par ailleurs, à qui veut-on faire croire que la dématérialisation des fiches de paie est une grande avancée sociale ?
Comprenez vous le tollé provoqué à gauche par ce projet de loi ?
Pierre Jacquemain. Oui. Ce projet de loi est une erreur historique. C’est une régression en matière de droits sociaux, dans la mesure où de nombreux acquis des travailleurs pourront être renégociés à l’échelle des entreprises, où le rapport de force est systématiquement défavorable aux salariés. C’est un non sens économique, parce qu’il n’est pas prouvé que cette loi créera de l’emploi. C’est enfin un non sens politique: quand on se dit de gauche, quand on s’estime progressiste, je ne vois pas comment on peut soutenir un tel texte.

RSA, prise en charge du financement et conditions de versement

RSA, prise en charge du financement et conditions de versement

Daniel Roucous
Vendredi, 26 Février, 2016

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« Si vous trouvez que les gens qui ont le RSA sont des assistés, démissionnez et vivez avec 470 € par mois, vous aurez autant de chance qu’eux. » Jean Rochefort, acrteur
AFP/Jean-François Monnier
Les demandeurs d’emploi en fin de droit sont de plus en plus nombreux à ne « vivre » que du RSA. Le point sur son financement et son versement.
Le RSA (revenu de solidarité active) c’est ce qu’on touche quand on est en bout de course d’indemnisation par le chômage (ARE) et par la solidarité spécifique (ASS). Et encore, il faut répondre à certaines conditions et il faut aussi que les départements, chargés de le budgétiser, en aient les moyens.
Et là ça devient compliqué. Le dernier bulletin de conjoncture de la caisse nationale des allocations familiales (organisme verseur) fait état de 2,50 millions de foyers bénéficiaires du RSA (+ 4,5% en un an). Ils étaient 1,93 million fin 2012.
Les départements à l’image de celui du Nord qui ne peut plus payer les 153 000 bénéficiaires (14% des ménages) ont alerté le gouvernement.
Le Premier ministre a donc reçu, jeudi 25 février 2016, une délégation de l’ADF (assemblée des départements de France). Il en est résulté que « l’Etat accepte une prise en charge du financement du RSA, à condition que les départements s’engagent à renforcer l’accompagnement des bénéficiaires vers l’insertion et l’emploi. »
Précisons que les départements ont la charge du RSA de base ou socle et l’Etat le RSA « chapeau ».
Les modalités financière de cette prise en charge ne seront connues qu’à l’issue, d’ici fin mars, d’une réunion entre les ministères concernés et l’ADF. Le Premier ministre a posé les principes suivants :
- une prise en charge de l’Etat sur la base des dépenses de l’année N-1,
- le maintien de ressources dynamiques aux départements, notamment la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) et les DMTO (droits de mutation à titre onéreux),
- la mise en œuvre de mécanisme d’incitation financière des départements à renforcer leurs dispositifs d’insertion (clause de retour à meilleure fortune, bonification de la DGF, en complément d’une inscription obligatoire des dépenses d’insertion des bénéficiaires du RSA.
En attendant pour verser le RSA en 2016 les départements ont besoin d’une aide chiffrée à 200 millions d’euros.
Et rien de prévu pour lever cette injustice qui fait que les départements les plus pauvres participent davantage au financement du RSA que les plus riches comme le signale le département de Seine-Saint-Denis ici
Revenons à l’objet de cette rubrique : le droit au RSA et les conditions.

Le RSA pour qui ?

 Comme son nom l’indique le RSA est un revenu de solidarité active attribué aux actifs sans revenu (RSA socle) et aux actifs dont le revenu est faible (RSA activité).
Peuvent donc en bénéficier les demandeurs d’emploi en fin de droits  ou en complément de l’ARE à certaines conditions…sous réserve de l’obligation de rechercher du travail. En savoir + sur
Le RSA est également le minimum vital qui doit être laissé à toute personne faisant l’objet d’une saisie sur salaire ou retraite. En savoir + sur
Il est encore une solution pour les agriculteurs dont la production n’est pas suffisamment rémunérée (c'est le cas lorsque le dernier bénéfice agricole forfaitaire connu (année n – 1) n’excède pas 800 SMIC au 1er janvier de l’année de référence). En savoir + sur
Il est également attribué aux jeunes actifs ou parents isolés de 18 à 25 ans, ce qui inclut les étudiants sous conditions (c'est le cas quand le revenu de leurs jobs est inférieur à 500 euros par mois). En savoir + sur  
Et aussi aux saisonniers qui répondent aux conditions générales, lorsque le montant de leurs ressources ne dépasse pas 12 fois le montant forfaitaire mensuel du RSA applicable à son foyer au premier janvier. En savoir plus sur
Les étrangers doivent remplir des conditions de durée de présence sur le territoire pour bénéficier du RSA comme préciser ici

A qui le demander et à quelles conditions ?

Attention, le RSA n’est pas attribué d’office mais sur demande auprès des Caf (caisses d’allocations familiales) ou des caisses de MSA (Mutualité sociale agricole).
Les conditions pour avoir droit au RSA selon son âge, ses revenus et sa nationalité ainsi que les formulaires de demande sont précisées en cliquant sur
Depuis le 1er janvier, seul le RSA socle est attribué puisque le RSA activité a fusionné avec la PPE (prime pour l’emploi) pour donner une prime d’activité (article 57 de la loi Rebsamen du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi – articles L842-1 et suivants du code de la sécurité sociale). En savoir + en cliquant sur 

Quels montants ?

Le RSA se monte actuellement à :
- 524,16 euros pour une personne seule ;
- 786, 24 euros pour une personne seule avec une personne à charge ou un couple ;
- 897,44 euros pour un parent isolé avec un enfant
- 943,49 euros pour un couple avec un enfant
- 1 100,74 euros pour un couple avec deux enfants ;
- 1 121 euros pour un parent isolé avec 2 enfants.
Ajoutez 209,66 € par enfant supplémentaire (224,36 € pour parent isolé).
Calcul du montant selon les ressources et forfait logement en cliquant sur

Quand les producteurs créent leur supérette

Quand les producteurs créent leur supérette

Lucie Tourette
Jeudi, 25 Février, 2016
L'Humanité

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PHOTOPQR/OUEST FRANCE
Alors que les agriculteurs se mobilisent contre les marges de la grande distribution, ils sont de plus en plus nombreux à se regrouper pour ouvrir leurs magasins, comme le Local près de Rouen.
 
Devant l’entrée, un panneau annonce : « Chez nous, tout ce que vous achetez est intégralement reversé aux producteurs. 0 % marge. » Bienvenue au Local, un jeune magasin créé par 12 producteurs des environs, dans un quartier résidentiel de la banlieue de Rouen. C’est justement l’un d’entre eux qui tient la caisse ce matin. « Bonjour, je suis Benoît, votre ­producteur de bœuf. » Sur sa veste est écrit « Salers », du nom des vaches qu’il élève. Benoît, 28 ans, encaisse, blague, donne des ­explications sur l’emballage sous vide qui permet de mieux conserver la viande, suggère une recette. Claire, gérante du magasin, commente : « Quand Benoît est derrière la caisse, on vend deux fois plus de viande. Les gens n’achètent pas de la viande, ils achètent la viande de Benoît. »

« On peut gérer sereinement notre entreprise »

Claire est à l’origine de ce projet. En 2013, elle vient de passer sa thèse d’archéologie et anime deux « Ruches ». Grâce à un site Internet, des producteurs locaux vendent directement aux clients et livrent une fois par semaine. Elle réfléchit alors au moyen de rendre les produits accessibles tous les jours. De leur côté, plusieurs producteurs cherchent à mieux vendre, en diminuant le nombre d’intermédiaires et en fixant un prix qui leur permette de vivre de leur travail. C’est le cas de Benoît qui, lorsqu’il a repris les rênes de l’exploitation familiale, vendait encore 60 % de sa production à un grossiste et cherchait à « arriver à 100 % de débouchés directs ». Le grossiste lui achète le kilo de carcasse (la viande non désossée) 4 euros et « ça couvre tout juste le prix de revient », commente-t-il. Grâce au Local, il a déjà ramené la part vendue à cet intermédiaire à 40 % de son cheptel. Au Local, il vend la viande 15 euros le kilo en moyenne. Après avoir retiré le coût de l’abattage, de la découpe, du conditionnement, du transport et de la main-d’œuvre, il estime qu’il gagne 5 euros par kilos, soit 1 euro de plus qu’en passant par le grossiste. « Avec 5 euros du kilo, explique-t-il, je me tire un salaire, on a pris un apprenti pour nous aider dans la préparation, on a construit un nouveau bâtiment pour que les bêtes aient plus d’espace l’hiver, bref on peut gérer sereinement notre entreprise. » C’est aussi pour développer sa part de vente directe que Noémie était entrée en contact avec la Ruche. En 2014, son mari et elle ont repris l’exploitation familiale de 10 hectares de vergers. Ils produisent cidre, jus de pomme, pommeau, calvados, vinaigre. Auparavant, Noémie vendait une large part de sa production à une dizaine de supermarchés. À quelques kilomètres de là, ses bouteilles de cidre remplissent toujours plusieurs étagères du rayon « produits locaux » d’une grande surface. Elles y sont vendues 2,45 euros pièce : « Même si ce n’est pas très rentable pour nous, ça représente de gros volumes et le règlement arrive rapidement. » Mais aujourd’hui, Noémie vend le plus possible en direct aux clients. Au Local, ses bouteilles sont vendues 2,80 euros l’unité, 2,33 euros les 12. Des prix qui lui permettent d’envisager plus sereinement le remboursement du prêt contracté au moment de l’installation.
Dans leur volonté d’écouler leur production à un prix plus juste, la plupart des futurs associés du Local, souvent à la tête de petites exploitations, s’étaient organisés depuis plusieurs années pour vendre une partie de leur production eux-mêmes, à la ferme ou sur des marchés. Le père de Benoît s’était lancé dans la vente directe en 2001, en livrant des colis de 5 kilos de viande à ses clients. Les vendredis et samedis, Noémie continue à tenir la boutique installée à la ferme. Des touristes viennent l’été, des clients habitués avant les fêtes. Mais « c’est un peu perdu », dit-elle en souriant. Les fermes sont loin des bassins de population. Pour vendre plus, il faudrait ouvrir un magasin dans une zone densément peuplée. Impossible pour un agriculteur seul de gérer un tel endroit, mais à plusieurs cela devient envisageable.

« C’est épanouissant de rencontrer les clients »

Claire décide donc de chercher un local commercial qui ait les caractéristiques d’un supermarché : en ville, avec un parking. Finalement, le Local s’est installé à côté d’un Super U. Un prêt de la banque a permis d’ouvrir en septembre. Puis, en octobre, sont arrivés les fonds collectés par Internet (voir encadré) et une subvention de la région.
Les associés ont élaboré collectivement les règles de leur fonctionnement. Pour éviter la concurrence entre eux, chacun sa spécialité : un éleveur de porcs, un maraîcher, un cidrier, etc. « Notre but, indique Claire, c’est de devenir un endroit où on peut faire un plein de courses. » Les prix correspondent aux prix moyens du supermarché voisin. Six mois après l’ouverture, le Local vend les produits de 25 agriculteurs. Chaque producteur paie un « loyer » fixe, allant de 50 à 1 200 euros par mois, quel que soit son chiffre d’affaires. Il est calculé pour chacun en fonction de plusieurs éléments : la surface occupée par ses produits, les besoins en main-d’œuvre (les légumes sont rangés en chambre froide tous les soirs, tandis que les bouteilles de cidre restent en rayon) et en électricité (bacs réfrigérés pour la viande ou les fromages). Ce loyer paie la location du lieu ainsi que le salaire de Claire et des deux vendeurs. Les producteurs viennent parfois aider à la vente, mais ce n’est pas une obligation. « Ils n’ont pas toujours le temps de faire du commerce, explique Claire. Chacun son rôle. » Benoît, lui, vient régulièrement : « Socialement, c’est épanouissant de rencontrer les clients, de décider de notre prix. »
 
Local et connecté pour plus de visibilité 
C’est un financement participatif lancé sur le site Ulule qui a permis aux associés du Local d’acheter une chambre froide. La collecte a dépassé les 5 000 euros espérés, atteignant 7 500 euros. Des amis ont participé, mais aussi beaucoup d’inconnus devenus clients. La page Facebook du Local est suivie par 683 personnes. Claire publie régulièrement photos et informations, propose des concours : « Dès qu’on publie quelque chose, c’est vu par 1 000 personnes. C’est facile à gérer. Ça nous fait de la pub facilement et gratuitement. » Souvent, lorsqu’elle publie une photo du dernier gâteau de Delphine, la pâtissière, un client appelle pour le réserver

« Fatima », c’est un mérite, pas un miracle

« Fatima », c’est un mérite, pas un miracle

Dimanche, 28 Février, 2016
Humanite.fr

Une soirée extrêmement suivie sur Canal+ a permis à la profession, réunie au théâtre du Chatelet à Paris, de clamer ses vivats.
Pour une fois, aucune raison de titrer « Navets César ». Nous sommes sur le sans faute, tant avec le choix de Florence Foresti en maîtresse de cérémonie dénonçant l’agression dont sont victimes les femmes –pas seulement au Maroc- qu’avec le règlement modérant désormais le temps d’effusion. Du coup, on ne regrette pas trop le temps où l’on se protégeait des frimas en planquant sur place au café du coin en compagnie des copains de la CGT. Tempus fugit.
Notre compliment principal va aux votants eux-mêmes. Comme s’ils avaient spontanément anticipés que des distinctions récompensant « Fatima » comme meilleur film et Arnaud Desplechin comme meilleur réalisateur, était le choix à faire.
En même temps, ce choix réparait les oublis de l’histoire puisque tant Philippe Faucon qu’Arnaud Desplechin ont été à l’occasion nommés mais jamais élu précédemment. Cette remarque s’applique également aux deux prix d’interprétation Vincent Lindon et Dominique Frot.
Mais, dans le même temps, qui aurait pu se souvenir du nom de la Danoise Sidse Babett Knudsen sans l’effet coup de loupe du aux César ? Personne.
 
Voilà pour notre opinion globale. Il ne reste plus qu’à souligner l’exceptionnel talent de Philippe Faucon, dans sa triple fonction de scénariste, de réalisateur et de directeur de comédiennes.
Grâce à lui, ce sont la dignité et la foi dans l’humain qui ont été mis en lumière.