jeudi 31 mars 2016

Le Qatar encore au stade de l’esclavagisme

Le Qatar encore au stade de l’esclavagisme

 
AFP
L’ONG Amnesty International dénonce dans un nouveau rapport les conditions de travail des migrants employés sur le chantier du Khalifa International Stadium à Doha. Le Qatar doit accueillir la Coupe du monde de football de 2022.
Les rapports de l’organisation de défense des droits de l’Homme Amnesty International sur l’exploitation des travailleurs étrangers au Qatar se suivent et se ressemblent. La pétromonarchie est dans le collimateur des syndicats et des ONG depuis que l’organisation de la Coupe du monde de football 2022 lui a été attribuée. « L’ONG Amnesty tacle sévèrement le Qatar », « Football : carton rouge pour le Qatar », écrivions-nous respectivement le 19 novembre 2013 et le 29 mai 2015 lors des précédentes enquêtes d’Amnesty International sur ce sujet.
Intitulé « Le revers de la médaille. Exploitation sur un site de la Coupe du monde de football Qatar 2022 », ce nouveau document, rendu public aujourd’hui, apporte un éclairage particulier sur le chantier du Khalifa International Stadium à Doha.  Ce stade devrait être le premier terminé en vue du tournoi et accueillir une demi-finale. Le stade Khalifa fait partie du complexe sportif de l'Aspire Zone, où se situent le centre d'entraînement de l'Aspire Academy et le centre médical Aspetar qui ont été utilisés par certains des plus grands clubs de football du monde comme le Paris Saint-Germain. Amnesty International y a réalisé 132 entretiens avec des ouvriers migrants entre février et mai 2015.

"Si tu veux rester au Qatar, reste tranquille"

« Il m'a insulté et m'a dit que si je me plaignais de nouveau je ne pourrais jamais quitter le pays. Depuis, je fais attention à ne pas me plaindre au sujet de mon salaire ou de quoi que ce soit d'autre. Bien sûr, si c'était possible je changerais de travail et je partirais du Qatar », témoigne Nabeel (un nom modifié afin de protéger son identité). Cet ouvrier métallurgiste est venu d'Inde pour travailler sur le chantier de rénovation du stade Khalifa. Il s'est plaint auprès de son employeur de ne pas avoir été payé pendant plusieurs mois. « Ici, je vis comme si j'étais en prison. Le travail est difficile, on a travaillé de nombreuses heures sous un soleil de plomb. La première fois que je me suis plaint au sujet de ma situation, peu après mon arrivée au Qatar, le chef m'a dit "si tu veux te plaindre, tu peux, mais cela aura des conséquences. Si tu veux rester au Qatar, reste tranquille et continue de travailler" », raconte Deepak (là aussi un nom d’emprunt), ouvrier métallurgiste népalais.
« Les abus dont sont victimes les travailleurs migrants entachent la conscience du football mondial. Pour les joueurs et les fans de football, un stade de coupe du monde est un lieu qui fait rêver. Mais pour certains des ouvriers qui se sont entretenus avec nous, c'est un cauchemar », déclare Salil Shetty, secrétaire général d'Amnesty International. « Après avoir fait des promesses durant cinq ans, la FIFA a en grande partie manqué à son devoir d'empêcher que la Coupe du monde ne soit bâtie sur un socle d'atteintes aux droits humains », ajoute-t-il. « La situation des travailleurs migrants, qui sont endettés, qui vivent dans des campements sordides dans le désert et qui sont payés une misère,  tranche résolument avec celle des footballeurs de haut niveau qui vont jouer dans ce stade. Ces ouvriers ne veulent qu'une chose, que leurs droits soient respectés : recevoir leur salaire en temps voulu, pouvoir quitter le pays si nécessaire et être traités avec dignité et respect », poursuit Salil Shetty.
Malgré de nombreux appels pour sa suppression, la « Kafala » est toujours en vigueur. En vertu de ce système de parrainage en vigueur au Qatar, les travailleurs migrants ne peuvent changer de travail ou de pays que si leur employeur (ou « parrain ») les y autorise. « La réforme de ce système de parrainage qui a été annoncée fin 2015 et qui a fait beaucoup de bruit ne va guère modifier les rapports de force entre les travailleurs migrants et leurs employeurs », écrit l’ONG.
Selon Amnesty International, le nombre de personnes travaillant sur les sites de la Coupe du monde va presque être multiplié par 10 pour atteindre le chiffre de 36 000 environ au cours des deux prochaines années.

Contre la loi travail, une mobilisation massive dans les rues de France

Contre la loi travail, une mobilisation massive dans les rues de France

 
Mobilisation à Rennes
Photo : Jean-François Monier/AFP
La mobilisation est d'ores et déjà un succès. Les dizaines de manifestations contre le projet de réforme du Code du travail qui ont lieu ce jeudi ont rassemblé au-delà des prévisions.
"Il y a une très forte mobilisation. (...) ça va au-delà de ce qu'on avait prévu", s’est réjoui le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez. "Il faut que le gouvernement prenne en compte ce qu'il se passe dans la rue." "Les premières manifestations sont beaucoup plus importantes que le 9 mars. Le gouvernement doit ouvrir les yeux", a réagi sur Twitter son homologue de FO, Jean-Claude Mailly.
Et en effet, les chiffres de mobilisation des premières manifestations impressionnent. 120 000 à Marseille, 100 000 à Toulouse, 30 000 à Bordeaux, 15000 au Hâvre, à Caen, à Montpelier… Au moins 250 lycées sont mobilisés en France et les mouvements de grève sont plutôt suivis.
Les syndicats ont d'ores et déjà prévu une nouvelle journée d'action le samedi 9 avril. "Il est important d'avoir la semaine prochaine une forte mobilisation. On sait que les salariés qui rejettent massivement le texte ne seront pas là aujourd'hui. Le samedi 9 avril sera l'occasion pour eux de montrer la force du mouvement", a ainsi expliqué Eric Beynel, porte-parole de Solidaires, avant le départ de la mobilisation parisienne.  "On a prévu une autre mobilisation samedi 9 avril, sauf si le projet est retiré", a confirmé Philippe Martinez.  "On est rentré dans un bras de fer", avait déclaré un peu plus tôt le secrétaire général de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, évoquant "une grande mobilisation sur tout le territoire le 9 avril".  Une réunion intersyndicale des sept organisations à l'origine des manifestations de ce jeudi doit confirmer cette initiative dans la soirée. Une autre journée d'action à l'appel des organisations de jeunes pourrait avoir lieu le 5 avril.


Dans l'hémicycle et dans la rue, même combat ! Lors de la session de questions au gouvernement du Sénat cet après-midi, le groupe communiste a brandi des pancartes demandant le retrait du projet de loi El Khomri :


 
À Strasbourg, 9 000 personnes ont défilé dans les rues du centre-ville contre le projet de loi Travail de Myriam El Khomri (photo : Jean-Jacques régibier)

 
Très forte mobilisation à Bordeaux :

Prés de 5000 manifestants à Chamberry :

mercredi 30 mars 2016

Pour en finir avec les expulsions: appel pour une sécurité sociale du logement

Pour en finir avec les expulsions: appel pour une sécurité sociale du logement

 
Photo : Marta Nascmento/Réa
Avec le printemps viennent la fin de la trêve hivernale et le retour des expulsions. Un absurde arbitraire qui dit qu’à partir du 1er avril, on a de nouveau le droit de priver des femmes, des hommes et des enfants d’un toit.
En 2012, 141 000 personnes vivaient à la rue, un chiffre qui est en augmentation de 50% depuis 10 ans. Cette réalité, les militants de terrain dans le domaine du logement que nous sommes, y sommes confrontés quotidiennement. Le fait que certaines personnes puissent se retrouver à devoir dormir dehors est une entorse fondamentale au droit au logement. Depuis longtemps, nous sommes nombreux à protester chaque année contre cette atteinte inadmissible à la dignité de milliers de personnes. Et pourtant, d’années en années, la situation ne fait qu’empirer.
Il est temps de faire des propositions concrètes pour en finir avec cette réalité. Rappelons que l’article 25 de la déclaration universelle des droits de l’Homme dispose que: « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires: elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »
De même, le préambule de la Constitution de 1946, qui a en France une valeur constitutionnelle dispose que : « 10. La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » En lien et en cohérence avec ces principes fondamentaux, nous proposons la mise en place d’une véritable sécurité sociale du logement. Cette proposition s’inspire de ceux qui, avant nous, pour appliquer les droits fondamentaux de la personne humaine, avaient imaginé la sécurité sociale dans un certain nombre de domaines: la santé, le chômage, la retraite. Ces dispositifs sont basés sur la contribution de tous à la solidarité nationale afin de garantir la dignité de la personne humaine. Nous considérons que ce principe de solidarité nationale doit être appliqué au logement.
 
L’accès à un logement conditionne bien d’autres droits. Ainsi, il est indispensable d’avoir un logement pour pouvoir étudier, travailler ou fonder une famille. La santé et les conditions d’habitat sont également liées, souvent tragiquement. C’est pourquoi la sécurité sociale du logement nous semble être l’une des conquêtes les plus importantes pour le progrès social dans l’avenir. Concrètement, il s’agit d’une caisse de solidarité alimentée par les bailleurs, les locataires et l’Etat et qui a vocation à faire appliquer réellement le droit au logement. Cette caisse indemnise un ménage pendant une période déterminée lorsqu’un accident dans la vie le met en situation de risque de perdre son logement.
 
L’indemnité versée permet au ménage qui en bénéficie de continuer à payer son loyer ou le remboursement de son crédit. Cette indemnisation temporaire a vocation à éviter qu’une période d’instabilité n’entraine un ménage dans la spirale terrible qui conduit à la perte de son logement. La cotisation à cette caisse de sécurité serait obligatoire et son bénéfice universel (locataires du parc privé, locataires du parc social et locataires des banques). Nous proposons que tous les dépôts de garantie des locataires soient placés sur un super livret A et que les intérêts versés abondent cette caisse. La caisse pourrait par ailleurs être abondée par une cotisation des bailleurs, qui pourrait d’ailleurs être différenciée selon le patrimoine que ceux-ci détiennent.
 
Les banques, qui bénéficieraient directement de cette solidarité –puisqu’elle éviterait les défauts de paiement sur les remboursements de crédits- devraient également participer au financement à travers une cotisation sur les prêts immobiliers. Enfin, l’Etat, garant de la cohésion nationale, devra aussi y prendre sa part. Ainsi, la fin des expulsions n’est pas simplement le rêve de quelques militants que l’on considère trop souvent comme égarés dans l’utopie. C’est un objectif réalisable grâce à une proposition simple, juste et crédible.
 
Les premiers signataires :
  • Ian Brossat, adjoint PCF à la maire de Paris chargé du logement et de l’hébergement d’urgence,
  • Marie-George Buffet, députée PCF de Seine-Saint-Denis,
  • André Chassaigne, député PCF du Puy-de-Dôme,
  • Agnès Deboulet, professeure de sociologie à l'université Paris-8,
  • Christian Favier, sénateur PCF du Val-de-Marne,
  • Florent Gueguen, directeur général de la FNARS,
  • Eddie Jacquemart, président national de la CNL,
  • Cayo Lara, coordinateur fédéral de la Gauche Unie (Izquierda Unida),
  • Pierre Laurent, secrétaire national du PCF et sénateur de Paris,
  • Isabelle Lorand, adjointe au maire de Vitry Sur Seine, responsable du secteur Ville-urbanisme du PCF,
  • Corinne Masiero, comédienne,
  • Stéphane Peu, maire-adjoint PCF de Saint-Denis et président de Plaine Commune Habitat,
  • Danielle Simonnet, coordinatrice Nationale du Parti de Gauche et conseillère de Paris,
  • Julien Talpin, chercheur en science politique au CNRS.  

Fin de la trêve hivernale, recours pour s'en sortir et pas se retrouver dehors

Fin de la trêve hivernale, recours pour s'en sortir et pas se retrouver dehors

 
Le 1er avril c’est la fin de la trêve hivernale, pas la fin de la protection des locataires qui disposent de recours. Idem pour les coupures d’électricité et de gaz.
Vous avez des difficultés à payer votre loyer et vos charges et votre propriétaire menace de résilier le bail qui signifierait votre expulsion.
Il est vrai que  l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 relative aux rapports locatifs fait obligation aux locataires de payer les loyers et les charges locatives aux termes convenus. Le défaut de paiement entraîne la résiliation du bail et donc l’expulsion du locataire mais seulement sur décision de justice et en dehors de la période hivernale qui prend fin le 31 mars minuit.
Cependant, lorsque le locataire se retrouve en difficultés financières (perte d’emploi ou chômage, baisse de revenu pour tout un tas de raisons, surendettement, maladie, accident, perte d’un conjoint etc.), tout n’est pas permis de la part du propriétaire ou de l’agence qui vous loue comme indiqué par la direction de l’information légale et administrative ici  

Nos conseils

- Vous pouvez d’abord demander à votre propriétaire un délai de paiement exceptionnel de votre loyer ou un échéancier. Vous devez faire valoir que, d’une part vous avez toujours réglé, sans retard, votre loyer et donc que vous êtes de bonne foi, d’autre part qu’il s’agit d’une exception due à une baisse de revenu pour une raison que vous lui expliquez.
Cependant, le propriétaire est libre d’accepter ou pas. S’il accepte un étalement du paiement, convenez de le mettre par écrit, daté et signé des deux parties.
S’il refuse vous devrez alors trouver des sources de financement ou une conciliation auprès des commissions de conciliation ou de prévention des expulsions qui siègent à la DDT (direction départementale des territoires) ici  
- Votre propriétaire ou l’agence qui vous loue ne sont pas conciliants, dans ce cas n’hésitez pas à appeler « SOS impayés de loyers » au 0 805 16 00 75 qui est un numéro d’appel gratuit mis à disposition par l’ANIL (Agence nationale d’information sur le logement). Vous serez alors mis en relation avec l’ADIL de votre département qui vous aidera à trouver la bonne solution rapidement.
Vous pouvez contacter l’ANIL par Internet ici
- Si ça ne vous dit rien ou que vous hésitez, voyez donc avec votre caisse d’allocations familiales ou de MSA, celle-ci octroyant des aides financières à cet effet, certes sous conditions à voir avec elle. Elle peut aussi faire intervenir le FSL (Fonds de Solidarité pour le Logement).

Autres possibilités
- vous bénéficiez d’une aide au logement (APL, ALS, ALF). Contactez l’organisme (Caf, MSA) qui vous la verse afin de la transmettre directement au bailleur ;
- vous pouvez demander à votre bailleur de faire exceptionnellement intervenir sa garantie des risques locatifs (GRL).  Il s’agit d’une assurance que les bailleurs privés sont tenus de souscrire auprès d’une assurance agréée pour garantir toutes les locations dont les loyers représentent au plus 50% des revenus du locataire. Elle garantit les loyers impayés dans les conditions et limites indiquées ici
- vous pouvez encore demander à un tiers ou un parent de vous prêter de l’argent au moyen d’un prêt écrit familial dont vous conviendrez du mode de remboursement et surtout du délai ;
- vous vivez en HLM ou dans un logement social, faites appel à la garantie LOCA-PASS qui aide à payer les loyers en cas de difficulté dans les conditions indiquées ici

 

Comment éviter les coupures d’électricité, de gaz et de téléphone ?

La fin de la trêve hivernale, c’est aussi la fin de l’interdiction des coupures d’électricité et du gaz. Les recours et nos conseils pour les éviter peuvent être lus ici et pour le téléphone et Internet c’est là
Quant aux coupures d’eau, elles sont interdites toute l’année

INFOS +

- communiqué de la ministre du logement sur le plan national de lutte contre les expulsions

Réforme de l’élection présidentielle : Jean-Luc Mélenchon interpelle les parlementaires

Réforme de l’élection présidentielle : Jean-Luc Mélenchon interpelle les parlementaires

 
Photo : Pierre Andrieu/AFP
Le co-fondateur du Parti de gauche et postulant à l’Elysée en 2017 a envoyé un courrier aux parlementaires mercredi pour les exhorter à ne pas accorder leur vote aux propositions de loi modifiant les règles de l’échéance présidentielle. Il les invite en revanche à accorder aux citoyens «un pouvoir de parrainage » des candidats.
Adoptées en fin de semaine dernière à l’Assemblée nationale dans un hémicycle plutôt désert,  et examinées à partir de jeudi par le Sénat en nouvelle lecture, deux propositions de lois, dont l’une est organique, modifient les règles régissant l’élection présidentielle soulevant une vague de contestation. Parmi les voix qui s’élèvent pour protester contre les changements prévus, celle du député européen Jean-Luc Mélenchon : « Je vous appelle solennellement à refuser ces deux textes », a-t-il écrit mercredi dans un courrier adressé aux parlementaires. Des dispositions prévues par la réforme, l’attention du candidat déclaré à la prochaine présidentielle de 2017 se porte particulièrement sur la modification des règles de collecte et de publicité des 500 parrainages d’élus,  indispensables pour s’inscrire dans la course. Si les textes entraient en vigueur la centralisation des signatures serait  faite directement par le conseil constitutionnel, et non plus via le candidat, et la liste en serait intégralement publiée alors qu'un tirage au sort sur les 500 noms est jusqu’à effectué. 
« Ne croyez pas qu’en cherchant à empêcher des candidatures vous éliminerez ce qu’elles veulent incarner. Ne pensez pas qu’une telle manoeuvre puisse rester impunie. Pensez à ce qui adviendrait pour notre démocratie si la manoeuvre en cours aboutissait. Les responsables PS qui sont à l’initiative de ce texte aimeraient notamment se débarrasser de ma candidature pour l’élection présidentielle de 2017 par ce moyen », prévient le co-fondateur du Parti de gauche. Au-delà d’appeler au rejet de ces changements, Jean-Luc Mélenchon invite également les parlementaires à se saisir de sa proposition d’accorder aux citoyens «un pouvoir de parrainage » : « Créez une deuxième voie d’accès au droit d’être candidat à l’élection présidentielle. Accordez le droit de parrainage citoyen à tous les électeurs », demande-t-il, quitte à accepter que les conditions posées rendent « l’exercice plus pénible et difficile ». Et de poursuivre son argumentaire avec l’exemple de sa propre candidature : «  Certes je n’ai l’aide d’aucun parti représenté au parlement actuel. Mais je crois que j’ai le droit de proposer mon programme aux suffrages si l’on tient compte des soutiens que j’ai déjà reçu de notre peuple dans un passé récent. J’ai déjà rassemblé 4 millions de voix en 2012, j’ai été réélu en 2014 député européen avec autant de voix que pour élire cinq députés nationaux, j’ai déjà recueilli 87 000 parrainages citoyens pour ma proposition de candidature. Envisagez-vous que je sois empêché de me présenter parce qu’il me manquerait le parrainage de quelques-uns de ces élus qui sont la condition pour être candidat ? », interroge-t-il remettant en cause « la légitimité de la personne élue » dans de telles conditions.
Dans un « post scriptum » argumentaire, Jean-Luc Mélenchon s’oppose également à une autre mesure prévue par la réforme. Car, outre la réduction à 6 mois de la tenue des comptes de campagne (contre 1 an), la fermeture au plus tôt à 19 heures des bureaux de vote (contre 18 heures aujourd'hui), la réforme modifie les principes qui régissent le traitement médiatique. L’article 4 de la proposition de loi organique, adopté jeudi soir par 11 députés PS, prévoit de substituer le « principe d’équité » à l’actuelle « règle d’égalité » des temps de parole des candidats pendant la période allant de la publication de la liste des candidats au démarrage de la campagne officielle.
« L’allongement de la période dite « d’équité » laissera libre cours aux connivences entre certains partis et certaines rédactions audiovisuelles et privera les citoyens d’une information loyale et égale sur tous les candidats », reproche l’eurodéputé.
Rien n’est encore joué puisque la majorité absolue sera nécessaire pour une adoption définitive.

Sapin II : une loi pour renforcer l'arsenal anti-corruption

Sapin II : une loi pour renforcer l'arsenal anti-corruption

 
AFP
Lobbies, lanceurs d'alerte, pots-de-vin des entreprises... Le gouvernement a présenté mercredi une série de mesures qu'il entend mettre en œuvre dans la loi Sapin II. Un texte qui va plutôt dans le bon sens pour beaucoup d’associations, mais qui comporte tout de même de nombreux manques.
Il était même urgent, parce que la France n’était pas au niveau des standards internationaux en matière de transparence et de lutte contre la corruption. Michel Sapin reconnait que la France est mal notée par les organisations internationales comme l'OCDE, notamment du fait de l'absence d'arsenal juridique adéquat en matière de corruption. Par exemple, les condamnations des entreprises françaises coupables de corruption internationale ont toutes été prononcées à l'étranger ces dernières années. « Inacceptable » pour le ministre des Finances. « L'objectif, c'est de "rompre le cercle de la défiance entre les citoyens et les acteurs publics ou privés »", a-t-il expliqué. C’est que dans le classement de l'ONG Transparency international, la France occupait en 2015 le 23e rang en matière de lutte contre la corruption, sur 104 pays notés. Loin derrière les pays d'Europe du Nord, mais aussi l'Allemagne, le Royaume-Uni ou les Etats-Unis.

Protection de certains lanceurs d’alerte

Le projet de loi Sapin II prévoit la création d'une "agence nationale de prévention et de détection de la corruption", chargée de contrôler la mise en place de programmes anti-corruption dans les grandes entreprises.
Il programme également la création d'un registre obligatoire pour les lobbyistes, la mise en place d'un statut protecteur pour les "lanceurs d'alerte", et la création de nouvelles infractions pour punir les faits de corruption transnationale.
Un ensemble d’association (1)  estime que ces mesures vont dans le bon sens mais qu’elles ne sont pas suffisantes. « Si  le  projet  de  loi  introduit  une  protection  des  lanceurs  d’alerte  conforme  aux  standards  internationaux  (protection  contre les  représailles,  anonymat,  prise  en  charge  des  frais  de  procédure,  publication annuelle des résultats) il ne concerne que les lanceurs d’alerte qui dénoncent des  faits de corruption. Il est nécessaire d’avoir un texte unique, qui protège tous les lanceur s  d’alerte, définis comme suit :  « toute  personne  signalant un  crime,  un  délit,  une  menace  ou  d’un préjudice grave pour l’intérêt général dont elle a connaissance dans le contexte de la  relation de travail.»

Plus d’impunité

Le texte ne comprend toutefois plus l'un des dispositifs phare du projet de loi, retiré in extremis par le gouvernement, faute de feu vert du Conseil d'Etat: la "transaction pénale", une mesure qui aurait permis aux entreprises mises en cause dans des affaires de corruption de payer une amende forfaitaire pour s'éviter un procès. Une mesure très contestée par les associations pour qui cette mesure « s’agit d’un pas vers une  déresponsabilisation  des  personnes  morales  pour  des  faits   de   corruption   et   une   impunité   de   fait , à  contrecourant des   initiatives  internationales  et  nationales en  cours. » C’était faire disparaitre la culpabilité. Bercy reste toutefois pour cette mesure qui pourrait revenir par la petite porte sous forme d’amendement au cours du débat parlementaire.
Le texte intègre enfin une série d'articles issus de l'ex-loi Noé, que devait porter le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, comme le renforcement des sanctions pour les entreprises en cas de retard de paiement, ou la clarification des règles de qualification pour certaines professions artisanales.

Mais de vrais manques

Les organisations « regrettent l’impasse sur des mesures incontournables pour que cette loi puisse réellement prétendre faire la transparence sur la vie économique, telles que le reporting pays par pays public pour l’ensemble des entreprises françaises dans tous les territoires où elles sont présentes, alors qu’il favoriserait une transparence indispensable dans la lutte contre l’évasion fiscale. De même, le texte ne prévoit pas d’obligation de créer un registre des bénéficiaires effectifs des sociétés, pourtant nécessaire dans le cadre de la lutte contre l’opacité des sociétés et des trusts. »
  • (1) Anticor, Attac, Bloom, CCFD-Terre Solidaire, Collectif Roosevelt, Justice et Paix, OCTFI, ONE, Oxfam France, Peuples Solidaires-ActionAid France, Réseau Foi et Justice Afrique Sherpa, Solidaires Finances Publiques, Syndicat de la Magistrature.

Trop, c’est trop !

Trop, c’est trop !

Mercredi, 30 Mars, 2016
Humanite.fr

Par La Coordination nationale Pas sans Nous
Les événements tragiques survenus à Bruxelles, qui ont endeuillé des dizaines de familles (aussi bien belges qu’étrangères), nous ont plongés dans l’émoi et dans la douleur. Ces attentats, comme ceux de novembre dernier et de janvier 2015 appellent à un élan de solidarité et de réflexion collective. Malheureusement, ce n’est pas ainsi que certains l’entendent et les amalgames et caricatures fusent de toutes parts.
Ici, c’est un ministre de la République qui pointe un doigt accusateur sur la Belgique en prétendant lui donner des leçons sur son manque de vigilance, voire sa naïveté ; ailleurs, c’est un responsable syndical de la police qui dit « Des Molenbeek, il y en a partout en France » faisant des quartiers populaires et de leurs habitants le cœur du terrorisme ; ensuite, c’est un député de la majorité gouvernementale qui appelle le gouvernement à « lutter contre les Molenbeek qu'il y a chez nous », transformant ainsi « Molenbeek » en nom commun pour désigner les quartiers populaires ; c’est enfin le ministre de la Jeunesses et des sports et de la ville qui affirme qu’une « centaine de quartiers en France » présentent « des similitudes potentielles avec Molenbeek ». Ces déclarations simplistes sont dangereuses et irresponsables car elles manient la peur et la tension sociale et ethno-raciale.
Nous ne dirons rien des propos réactionnaires et haineux des responsables politiques de droite. Que pouvions-nous en attendre ? Mais, pour autant, faut-il rappeler au ministre en charge de la politique de la ville que sa mission est de travailler à la solidarité et à la justice spatiale pour les quartiers populaires et leurs populations qui vivent au quotidien les injustices sociales et économiques et non de les montrer du doigt, de les présenter comme des coupables potentiels et des creusets du terrorisme ? Faut-il rappeler que combattre ces actes terroristes appelle à en comprendre les racines, autrement plus complexes, sous peine de s’engager plus avant dans la spirale de la violence ?
Trop, c’est trop ! La Coordination nationale Pas sans Nous élève ici ses plus vives indignations sur les amalgames qui ne cessent d’être portés à l’encontre des quartiers populaires et de leurs habitants. Déjà, au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo, nous faisions une lettre au Président de la République, François Hollande, pour lui faire part de notre inquiétude sur « les amalgames et la montée des tensions sociales, du racisme et de l’intolérance, de l'islamophobie et de l'antisémitisme ».
Quelques semaines plus tard, nous disions sur Médiapart notre colère : « Nous sommes particulièrement choqués des raccourcis qui consistent à assimiler les déficits de citoyenneté aux quartiers populaires, et inquiets d’un certain nombre de mesures qui ne conduiront qu’à accentuer encore la stigmatisation des plus pauvres. »
Aujourd’hui, nous disons à la fois notre solidarité avec tous les habitants des quartiers populaires, injustement montrés du doigt et notre profonde colère : les seules réponses du gouvernement sont « état d’urgence et déchéance de nationalité » ! En ne prenant pas la mesure de la situation, en jouant avec la peur et en inventant des coupables, le gouvernement prend une lourde responsabilité. Trop, c’est trop ! 

Sia Anagnostopoulou : « Il n’y a dans le néolibéralisme ni passé, ni futur »

Sia Anagnostopoulou : « Il n’y a dans le néolibéralisme ni passé, ni futur »

 
Photo : DR
Sia Anagnostopoulou est ministre déléguée à l’éducation dans le gouvernement d’Alexis Tsipras. Elle pose un regard de militante politique mais aussi d’historienne sur la crise des réfugiés, la tutelle des créanciers, les impasses du néolibéralisme.
Athènes, envoyée spéciale.
Comment expliquez-vous l’extraordinaire élan de solidarité du peuple grec envers les réfugiés, tandis que l’extrême droite poursuit son ascension dans la plupart des pays d’Europe ?
Sia Anagnostopoulou Après tous les malheurs endurés depuis six ans, la société grecque n’est pas sous l’emprise idéologique du néolibéralisme. Elle n’a pas coupé les liens avec son histoire, qui est aussi une histoire d’exil, d’asile, d’émigration. Nos racines, notre passé remontent à la surface à la vue de cet exode des réfugiés syriens, irakiens, afghans. Ces images rappellent aux Grecs celle des réfugiés d’Asie mineure arrivés en 1922. Le néolibéralisme, ce n’est pas seulement l’austérité, l’affirmation selon laquelle l’alternative économique n’existe pas. C’est aussi la coupure radicale des sociétés avec leur histoire, leurs traditions. Il n’y a pour le néolibéralisme ni passé, ni futur. Il n’y a que le présent du profit pour quelques-uns. La société grecque, heureusement, refuse de couper le présent du passé : la solidarité avec les réfugiés en est une manifestation.
Autre facteur, l’attitude du gouvernement de gauche, qui imprime un contenu politique à cette empathie puisée dans le passé. Une société est toujours travaillée par des courants contradictoires. Elle est traversée par des sentiments de xénophobie, de racisme, de conservatisme, mais aussi par des sentiments de solidarité, d’ouverture à l’autre. Et là, l’attitude des responsables politiques est déterminante pour faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Si la Grèce était aujourd’hui dirigée par un gouvernement de droite, la société aurait certainement adopté un autre comportement vis-à-vis des réfugiés. Les actions de solidarité n’auraient jamais revêtu la forme du mouvement populaire qui se développe actuellement. Bien sûr, l’extrême droite, avec Aube dorée, continue de s’exprimer, d’agir, de menacer les musulmans, de désigner les réfugiés comme un danger. Mais ce discours est inaudible, il fait même honte à la plupart des Grecs. Avec la droite au pouvoir, l’atmosphère serait complètement différente.
Cette question des réfugiés est-elle instrumentalisée, à l’échelle européenne, pour renforcer encore les pressions sur la Grèce ?
Sia Anagnostopoulou Oui. Depuis six ans, les Grecs sont systématiquement désignés comme des incompétents, inaptes à gérer leur économie, aujourd’hui incapables d’assurer l’étanchéité des frontières extérieures de l’Union européenne. Mais que faudrait-il faire ? Repousser les réfugiés qui fuient la guerre ? Les noyer dans la mer Égée ?
Le recours à des patrouilles de l’Otan en mer Égée correspond, de ce point de vue, à une confiscation supplémentaire de souveraineté…
Sia Anagnostopoulou Ce danger existe. Pourquoi l’UE n’est-elle pas capable de répondre à cette question des réfugiés par une répartition équitable des réfugiés, proportionnelle à la population de chaque pays ? Il faut noter ici que cette Europe qui peut imposer l’austérité et la décomposition des sociétés se montre incapable de faire respecter des règles élémentaires de solidarité, de surmonter par elle-même cette crise. D’où le choix de concéder une partie de ses prérogatives, de son pouvoir à l’Otan. Ce qui revient à confier le traitement d’un problème politique et humanitaire à une organisation militaire.
L’UE vient de conclure avec Ankara un marché sur le dos des réfugiés, au mépris du droit d’asile, de la convention de Genève. Cette démarche est-elle viable ?
Sia Anagnostopoulou Oui, il s’agit bien là d’un marchandage, sur le dos des réfugiés, entre l’UE et la Turquie. En oubliant les problèmes politiques très sérieux qui se posent en Turquie, en particulier avec les Kurdes. L’Union européenne tourne une fois de plus le dos aux valeurs dont elle se réclame. Bruxelles brandit des règles, mais aménage des exceptions lorsqu’il s’agit des frontières, des réfugiés. L’UE se montre au contraire inflexible lorsqu’il s’agit de maintenir la tutelle de l’austérité, au mépris de la démocratie. Nous sommes dans une période très difficile pour l’Europe. Ce vide politique sur la question des réfugiés est une aubaine pour l’extrême droite.
La Grèce subit toujours les diktats des créanciers et des institutions européennes. Avec la revue en cours du programme d’austérité, le quartet (Banque centrale européenne, Fonds monétaire international, Commission européenne, mécanisme européen de stabilité) place le gouvernement grec dans une impasse, en exigeant de nouvelles coupes dans les pensions de retraite, déjà amputées de 40 % en moyenne depuis six ans. Quelles voies de sortie entrevoyez-vous ?
Sia Anagnostopoulou C’est très difficile pour ce gouvernement, qui a accepté le mémorandum de juillet 2015 sous chantage. Le pays était menacé de faillite économique complète. Nous devons gérer, en outre, cette question des réfugiés bloqués en Grèce par la fermeture de la route des Balkans. La stratégie du quartet consiste à pousser à bout une société déjà sous pression. Les Grecs doivent assumer seuls l’accueil de populations fuyant la guerre. Dans le même temps, on veut les priver de retraites dignes, qui permettent souvent à plusieurs générations de survivre. Et on prétend les expulser de leur habitation principale, lorsque le chômage les place dans l’impossibilité de rembourser leurs emprunts immobiliers. Ce peuple vit mal, souffre depuis six ans et on veut l’essorer encore : c’est vraiment lamentable. Et tout le monde sait que ce programme d’austérité ne permettra jamais à la Grèce de revenir sur les rails du développement. C’est une politique d’aveugles.
Une politique dont le gouvernement Tsipras a accepté la mise en œuvre, le 12 juillet 2015…
Sia Anagnostopoulou Sous la menace, ce gouvernement a mis de côté son programme, son idéologie, pour signer et appliquer ce mémorandum. Mais nous ne pouvons pas mettre en œuvre des politiques de destruction complète de la société, des liens de solidarité, comme on nous le demande avec la réforme des retraites. Nous essayons de garder cette société debout, avec les mesures du « programme parallèle » visant à protéger les plus fragiles, les plus démunis. Deux millions de personnes privées de protection sociale par la perte de leur emploi peuvent ainsi, désormais, être soignées gratuitement dans les hôpitaux publics.
Après la bataille perdue de juillet 2015, comment résister, désormais, à ces diktats néolibéraux ?
Sia Anagnostopoulou Pour moi, comme pour tout le gouvernement, la priorité, c’est de garder la société grecque debout, avec des mesures empêchant la marginalisation d’une majorité de citoyens qui souffrent. Nos prédécesseurs étaient, eux, surtout guidés par la préservation des intérêts d’une minorité de privilégiés que l’austérité n’a pas empêchés de s’enrichir toujours plus. Avec la réforme des retraites, nous atteignons un seuil. Pour moi, la sauvegarde d’un système par répartition, le refus de nouvelles coupes dans les pensions constituent une ligne rouge. Céder sur ce point, ce serait accepter l’extrême appauvrissement d’une grande partie de la population. Non seulement les retraités eux-mêmes, mais aussi les familles entières qu’ils font vivre grâce à leurs maigres pensions. J’espère que, cette fois-ci, cette ligne rouge sera respectée.
La contestation des politiques d’austérité grandit dans d’autres pays d’Europe, en Espagne, au Portugal, en Irlande, etc. Ce courant politique peut-il, à moyen terme, faire évoluer le rapport de forces ?
Sia Anagnostopoulou Pour moi c’est une grande source d’espoir. Même au plus fort de l’hégémonie néolibérale, j’étais convaincue, en tant qu’historienne, que d’autres forces politiques allaient finir par émerger. J’espère que nous pourrons renforcer ces tendances de résistance au néolibéralisme. Ce n’est pas simple. Nous manquons de moyens. Et surtout, accablées par ces choix d’austérité, les sociétés ont perdu confiance dans le futur. Pour faire renaître un espoir de changement, les citoyens doivent retrouver confiance en eux-mêmes. C’est toute la difficulté à laquelle est confrontée Syriza. Si nous sommes durablement contraints d’appliquer des mesures contraires à notre programme, à notre projet politique, cela finira par installer l’idée selon laquelle il n’y a pas d’autre voie possible. La plus grande angoisse, pour moi, serait que nous confirmions à notre corps défendant la devise de Margaret Thatcher : « Il n’y a pas d’alternative. »
Syriza a surtout fonctionné comme une mécanique électorale de contestation de l’austérité. Avez-vous pâti de votre manque d’enracinement social ?
Sia Anagnostopoulou D’une certaine façon, oui. Nous défendions un programme modéré, nous étions guidés par les principes de justice, de rationalité économique. Après la victoire électorale du 25 janvier 2015, nous étions enthousiastes, convaincus que la justesse de nos positions pèserait dans la balance des négociations à Bruxelles. C’était naïf. Lorsqu’on est de gauche, il faut prendre en considération les rapports de forces. Or, le rapport de forces était totalement en notre défaveur.
En fait, sous le régime du néolibéralisme, gouverner ne signifie pas du tout disposer des leviers du pouvoir…
Sia Anagnostopoulou C’est la première et sans doute la plus importante leçon que nous tirons de cette expérience politique ! Cette Europe ne fonctionne pas démocratiquement. Beaucoup plus qu’un problème économique, c’est un problème démocratique qui se pose. Si vous êtes placé sous surveillance, vous n’avez pas la liberté de légiférer, ni d’agir politiquement en fonction des revendications et des besoins de la société. Il faut en permanence prendre en considération les exigences de ceux qui vous surveillent. Sous surveillance très étroite, nous tentons de faire valoir, coûte que coûte, les besoins de la société grecque. C’est très compliqué. Comme ministres, nous n’avons ni marges de manœuvre budgétaire, ni pouvoir, ni liberté de choix. Ceci dit, même dans de telles conditions, un gouvernement de gauche est préférable pour arracher tout ce qui peut l’être en défense des plus fragiles.
L’ajustement structurel, dans les pays du Sud, a conduit à la déstructuration des sociétés, à l’effondrement des États. Doit-on redouter de tels développements en Europe ?
Sia Anagnostopoulou Pour moi, oui, clairement. Ce danger existe, comme d’ailleurs celui du repli nationaliste. Comme les peuples ne perçoivent pas, pour sortir de la crise, de réponses justes à l’intérieur de l’Union européenne, ils sont tentés par les nationalismes les plus féroces, comme au siècle dernier, dans l’entre-deux-guerres.
Syriza s’inscrit dans la tradition d’une gauche proeuropéenne. Si la tutelle des créanciers devait se resserrer encore, pourriez-vous défendre la perspective d’un défaut souverain sur la dette et celle d’une sortie de la zone euro ?
Sia Anagnostopoulou Je crois que si nous sommes poussés à cette extrémité, nous le ferons. Nous ne sommes pas favorables à une sortie de la monnaie unique. Dans les conditions actuelles, ce serait synonyme de catastrophe économique pour la Grèce. Mais peut-être que ce sont les orientations économiques et politiques de l’Union européenne qui conduiront au démantèlement de la zone euro… Le seul espoir réside à mes yeux, aujourd’hui, dans le renforcement du camp anti-austérité, pour changer les rapports de forces et freiner enfin ces politiques de destruction sociale. J’ajoute que la question des réfugiés modifiera profondément l’Europe, à moyen terme. Il y a bien sûr le danger de l’extrême droite. Mais je suis convaincue que cette crise fera émerger, aussi, de puissantes forces porteuses de solidarité, de justice, de progrès.
Près de 50 000 réfugiés bloqués en Grèce. Le nombre de réfugiés bloqués sur le territoire grec suite à la fermeture de la route des Balkans dépassait en début de semaine les 46 000 personnes, selon les estimations de l’organe de coordination de la gestion de la crise des réfugiés. Ils sont plus de 7 200 sur les îles et plus de 13 500 dans des structures d’accueil en Attique et dans le port du Pirée. Ailleurs dans le pays, ils sont plus de 13 500 à avoir trouvé refuge dans les centres d’accueil. Près de 11 000 réfugiés attendent toujours aux abords de la frontière gréco-macédonienne, à Idomeni et à Polikastro.

Etudiants, lycéens, les demandes de bourses c’est maintenant

Etudiants, lycéens, les demandes de bourses c’est maintenant

 
Document CROUS
Des bourses sur critères sociaux sont attribuées aux étudiants, lycéens et collégiens. Bougez-vous dès maintenant !
N’attendez pas la dernière minute… les étudiants et futurs étudiants ont jusqu’au 31 mai pour demander une bourse sur critères sociaux et/ou un logement en résidence U pour 2016/2017.
Pour cela, il faut très vite constituer le dossier social étudiant (DSE). Cette procédure permet de demander, à partir du même dossier, une bourse sur critères sociaux et un logement en résidence universitaire auprès du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous).
Munissez-vous de l’avis fiscal de vos parents, de la copie des justificatifs de votre scolarité et connectez-vous sur le site web du CROUS de votre académie.
Le simulateur de bourse sur critères sociaux est ici
Pour la simulation de calcul, vous devez fournir le montant de vos ressources, le nombre d’enfants à charge des parents, le nombre de frères et sœurs dans l’enseignement supérieur, la distance kilométrique entre l’établissement et la commune de votre domicile. De deux choses l’une :
- le "niveau d’échelon" est « 0 », vous êtes exonéré des droits universitaires et de la cotisation à la sécurité sociale étudiante,
- le "niveau d’échelon" est compris entre « 0 bis » et « 7 », le montant annuel de votre bourse est précisé par le simulateur.
Si vous loupez la date d’échéance de demande de bourse du 31 mai, il est encore possible, jusqu’au 30 septembre,  de faire une demande de bourse en retard en passant par l’UNEF ou l'UEC en effectuant les démarches indiquées sur le lien suivant 
En cas de coup dur, demandez une aide d’urgence
Les étudiants de première année qui ont obtenu une bourse sur critères sociaux doivent savoir qu’ils peuvent bénéficier d’une aide au mérite s’ils ont obtenu la mention « très bien » au BAC. Pas de démarche à faire puisque les CROUS ont reçu les listes des bacheliers ayant obtenu la mention « très bien ». Cette aide leur est donc attribuée automatiquement sous réserve d’être boursier.
Ces aides peuvent se cumuler. Pour en savoir plus cliquez sur
Pensez aussi à demander un logement étudiant sur critères sociaux comme indiqué ici  
+ d’infos ici

Les bourses de lycées et collèges

La bourse de lycée est attribuée en fonction des ressources de l'année N – 2, soit en fonction des ressources 2014 pour la rentrée scolaire 2016. C'est le revenu fiscal de référence 2014 figurant sur l'avis d'imposition sur le revenu 2015 qui sera pris en compte.
A titre exceptionnel, les ressources de l'année 2015 pourront être prises en compte en cas de modification majeure de la situation financière de la famille entre 2014 et 2015.
Les ressources de la famille ne doivent pas dépasser un plafond annuel défini par un barème national comprenant six échelons. Un permet d'obtenir une estimation du montant de la bourse.
Les dossiers de demande de bourse sont disponibles auprès des établissements. La démarche peut également être effectuée en .
Les élèves déjà bénéficiaires en 2015-2016 d'une bourse de lycée, qui vont accéder à la rentrée scolaire 2016, en deuxième année de certificat d'aptitude professionnelle ou de brevet des métiers d'art ou en classe de première ou terminale de baccalauréat ou de brevet de technicien, conservent jusqu'à la fin de leur formation, le bénéfice de leur bourse obtenue selon les conditions en vigueur avant la rentrée scolaire 2016.
En savoir plus ici pour les bourses de lycée et là pour les bourses de collège.

Décès d'Alain Decaux

Décès d'Alain Decaux

Dimanche, 27 Mars, 2016
  
AFP
L'académicien est mort ce dimanche 27 mars, à l'âge de 90 ans. Homme de télévision où il avait crée de nombreuses émissions dédiées à l'histoire il a publié de nombreux ouvrages dont Letizia : Napoléon et sa mère, récompensé par l'Académie française, où il est entré en 1979. Il a aussi été ministre délégué en charge de la Francophonie dans le gouvernement de Michel Rocard, entre 1988 à 1991.
À partir des années 1950, ce formidable conteur, auteur d'une soixantaine d'ouvrages, a incarné l'histoire à la radio et à la télévision, où il a créé plusieurs émissions célèbres. Filmé en plan fixe, il avait le don de captiver les téléspectateurs avec la bien nommée émission Alain Decaux raconte. Pendant des années, ce historien à la mémoire prodigieuse, rappelait aux Français les grandes et petites anecdotes de leur histoire en jouant sur les silences, le suspense et les rebondissements... Tout y passait, dans un brillant éclectisme populaire : Louis XVII, la bête du Gévaudan, le radeau de la Méduse, les quatre sergents de La Rochelle, Landru, le secret de Monte-Cristo...

Certes l’on pourra critiquer — et l’on a critiqué — cette vision du passé, trop psychologique, trop événementielle, trop romancée, trop académique. Mais sa vertu était irréfutable : elle suscitait la curiosité !
Né dans le Nord, à Lille en 1925, Alain Decaux avait (comme beaucoup de Français !) des ancêtres paysans, un grand-père instituteur, un père avocat. Il passe son enfance à la campagne, poursuit ses études en ville et partage son temps entre la lecture et les escapades familiales sur les plages belges. Lors de la seconde guerre mondiale, la famille se réfugie dès 1939 en Bretagne, chez des cousins. Puis son père finit par se fixer à Paris, comme administrateur judiciaire, et toute la famille s'installe dans la capitale.  « C'est ainsi que je suis devenu parisien et que j'ai pu faire cette carrière, a-t-il un jour reconnu. C'est la guerre qui a fait de moi ce que je suis. »
 
Alain Decaux a toujours aimé les livres, depuis sa plus tendre jeunesse. À 11 ans, il est hospitalisé pour une crise d'appendicite. Pour l'occuper, son grand-père lui offre Le Comte de Monte-Cristo, qui fut pour lui une révélation. Dès lors, il demande à son père un livre d'Alexandre Dumas à chaque fois qu'il rapporte une bonne note de l'école et se plonge dans la lecture des ouvrages de Lenotre, le « pape » de la petite histoire, qui va fortement l'influencer. À l'adolescence, il se rêve auteur dramatique, à l'image de son autre idole, Sacha Guitry.
Les hasards du destin lui feront croiser le célèbre dramaturge. À la Libération, Guitry est soupçonné et emprisonné. Decaux, alors mobilisé, apprend la nouvelle, fonce au domicile et s'improvise gardien des lieux pour éviter tout pillage... Le maître lui en sera toujours reconnaissant : « Puisque vous avez sauvé cette maison, elle est un peu la vôtre », lui lance-t-il. Parrainé par Guitry, toujours bienveillant, le jeune auteur comme à publier : d'abord une enquête sur Louis XVII – l'un de ses thèmes de prédilection –,  suivie d'une biographie de Letizia, la mère de Napoléon, couronnée par l'Académie française alors qu'Alain Decaux n'a que 25 ans !
En 1960, il fonde la revue Histoire pour tous, et va collaborer à de nombreux journaux et revues. Dialoguiste du film "Les misérables" (1982) de Robert Hossein, avec qui il aura une intense collaboration artistique, il est aussi biographe de Victor Hugo et admirateur d'Alexandre Dumas (toujours !) , à qui il consacre en 2010 un "Dictionnaire amoureux".
On lui doit aussi "Alain Decaux raconte la Bible aux enfants", "C'était le XXe siècle" (en quatre volumes), "Le Tapis rouge", sur son expérience ministérielle, ou au théâtre, "N'ayez pas peur" sur le pape Jean Paul II.
Alain Decaux a été en 1973 le premier président, élu au titre de la télévision, de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. En 1989, il a été nommé coordonnateur de la politique télévisuelle extérieure française. Depuis 1999, il existe un prix Alain Decaux de la francophonie.
Marié deux fois, père de trois enfants, il a été élevé en 2014 à la dignité de grand'croix de la Légion d'honneur.

La haute mer, un Far West en quête de shérif

La haute mer, un Far West en quête de shérif

 
Les Nations Unies ouvrent à partir de lundi des négociations en vue de l’établissement d’un accord international sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine au large des côtes.
Après le ciel, la mer. À l’image de ce qu’elle a mis en place il y a plus de vingt ans pour le climat, l’ONU ouvre ce lundi, à New York, un premier cadre de négociations consacrées à l’établissement d’un droit international en faveur de la haute mer. Il ne s’agit pas encore du grand soir pour la protection du grand large.

Jusqu’à présent, la Grande Bleue n’intéressait pas grand monde

Après dix années de discussions informelles, les États qui se sont impliqués volontairement sur le sujet se sont juste mis d’accord à la fin de l’année dernière pour ouvrir des discussions en vue de la rédaction d’un éventuel « accord international sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine », dans les zones situées au-delà des eaux rattachées à un État. Tout cela devrait intervenir en 2018 pour les plus optimistes, en 2020 pour les plus pragmatiques.
Jusqu’à présent, la Grande Bleue n’intéressait pas grand monde. Il existe bien la convention de l’ONU sur le droit de la mer (CNUDM). Mais celle-ci parle d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître. À l’époque de la signature de ce texte en 1958, remis à jour en 1982, les États ont mis le paquet sur la définition de leurs droits de propriété dans les eaux et fonds proches de leurs côtes. Le reste a été laissé en jachère. Seule l’industrie de la pêche, guettée par les quotas donc appâtée par la pêche en haute mer, les industries minières, alléchées par les nodules polymétalliques, et la marine marchande, qui convoie 90 % du trafic commercial global, avaient dû faire avec les réglementations. La FAO (Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture), l’Organisation maritime internationale et l’Autorité internationale des fonds marins pour les droits d’exploitation miniers s’étaient chargées de mettre en place ces dernières.
Mais les moins de 30 ans peuvent témoigner que les choses ont bien changé. Depuis 1977, des écosystèmes ont été mis au jour au fond des fosses océaniques, qui ont déjà attiré des spécialistes publics ou privés de la bioprospection et du brevetage du vivant.

L’industrie de l’aquaculture imagine des fermes géantes loin des côtes

Les fonds marins sont des terrains de développement pour les énergies marines (hydroliennes, énergie des vagues et marémotrices), les énergies fossiles (pipelines et forages en eau profonde) ou la géo-ingénierie (ensemencement des océans pour capter du CO2). Quant aux eaux de surface, l’industrie de l’aquaculture imagine des fermes géantes loin des côtes, tout comme des promoteurs privés en vue de construire de prochaines villes en zones extraterritoriales.
Des pays comme les États-Unis, la Russie ou le Japon estiment que la règle du premier arrivé, premier servi, sur ses nouvelles ressources, constituait le plus juste des principes. Encouragés par les ONG, l’Union européenne et le G77 + Chine (coalition de pays en voie de développement) leur opposent l’établissement de régulations en faveur de ces nouveaux « biens communs de l’humanité », via des aires marines protégées en haute mer reconnues par l’ONU, l’obligation d’étude d’impact environnemental avant toute exploitation des abysses ainsi que des garde-fous pour protéger l’accès à tous aux ressources marines. Cette seconde conception grignote du terrain. Elle n’a pas encore gagné la haute mer.

Le stress hydrique gagne des régions du monde... La preuve en Île-de-France

Le stress hydrique gagne des régions du monde... La preuve en Île-de-France

 
La Seine en crue, le 29 décembre 1999 à Paris.
AFP
Du 7 au 18 mars, les télévisions nous ont transmis des images de manœuvres qui ont mobilisé 110 sapeurs-pompiers et 200 sauveteurs dans la simulation d’une crue du siècle, toujours possible en Île-de-France. La dernière grande crue date de 1910. Elle inonda des quartiers de Paris et plusieurs villes de banlieue.
Depuis la construction de grands barrages sur plusieurs affluents de la Seine à partir du milieu du XXe siècle, la capitale est mieux protégée des inondations. Ces barrages stockent de l’eau quand il pleut beaucoup en amont de Paris. Ils en lâchent pour soutenir l’étiage de la Seine durant les mois d’été. Entre juin et septembre 2015, ils ont lâché 80 mètres cubes d’eau par seconde, soit 75 % du débit de la Seine à Paris.
On oublie facilement que, sans ces barrages, il serait difficile de trouver dans la Seine et ses affluents une quantité et une qualité d’eau suffisantes pour alimenter les usines de traitement des eaux qui fournissent l’eau potable. Cela étant, au cours de ce siècle, le réchauffement climatique pourrait faire alterner davantage les sécheresses et une forte pluviométrie sur le bassin-versant de la Seine et de ses affluents. Des crues plus fréquentes demeurent possibles et pourraient causer de gros dégâts dans une région peuplée de 12 millions d’habitants. Voilà aussi pourquoi la gestion de l’eau va être un énorme enjeu au XXIe siècle.
Le risque de pénurie d’eau va également être plus élevé. « Le Loiret agricole et rural », un hebdomadaire paysan, faisait état, dans son édition du 19 février dernier, d’une baisse sensible du niveau de l’eau dans la nappe de Beauce. En un an, le niveau moyen avait baissé de 103 centimètres, dont 90 centimètres directement imputables au pompage, par les agriculteurs, pour irriguer leurs cultures de céréales. Dans la nappe du plateau situé entre Montargis et Pithiviers, dont les sources en vallée alimentent le Fusain, un affluent du Loing, le niveau de la nappe était, cet hiver, 2 mètres plus bas qu’au début de 2015, et les trois quarts de cette baisse étaient imputables aux pompages d’irrigation du printemps dernier. Même après la fin de l’irrigation et l’arrivée de l’automne, la nappe a encore baissé de 55 centimètres, faute d’une pluviométrie suffisante. Du coup, son niveau dans cette zone se trouvait à 3,70 mètres en dessous du seuil d’alerte. Or, dès le début du printemps, l’eau de pluie qui pénètre dans le sol est absorbée par la végétation. La nappe de Beauce va donc encore baisser en 2016.
Désormais, il vaut mieux stocker de l’eau en surface que la puiser dans les nappes souterraines. C’est pourtant dans les nappes que les eaux pour divers usages sont massivement puisées aux États-Unis, en Chine, en Inde, au Pakistan, en Iran et dans la plupart des pays de Proche et du Moyen-Orient. La facture de cette imprévoyance sera lourde pour les peuples dans les prochaines décennies. Évitons de faire la même chose en France.

Abattoirs, des inspections spécifiques sur la protection animale et après ?

Abattoirs, des inspections spécifiques sur la protection animale et après ?

 
AFP
Suite à des actes de cruauté dans un abattoir des Pyrénées, le ministre de l’agriculture a ordonné des inspections dans tous les abattoirs. Les problèmes de fond demeurent.
Une nouvelle vidéo de l’association de défense des animaux L214 téléchargeable ici montre une nouvelle fois la cruauté et l’illégalité des conditions d’abattage des animaux dans les abattoirs.
Ca se passe à Mauléon-Licharre (Pyrénées-Atlantiques) dans les abattoirs du pays de Soule certifiés bio, Label Rouge et IGP (Indication géographique de provenance) ! Et c’est juste après le scandale de l’abattoir de Le Vigan (Gard), reouvert pour des raisons purement commerciales avant Pâques (agneaux pascal oblige) qui a suivi celui d’Alès (Gard). Est-ce à dire que tous les abattoirs pratiquent ainsi, abattent les animaux façon « halal » c'est-à-dire sans étourdissement pour parer au plus pressé, au manque d’effectifs, aux cadences ?
Cette troisième vidéo de L214 fait du bruit parce qu’elle est diffusée en boucle sur BFMTV et reprise par l’ensemble des médias après avoir fait la Une du journal Le Monde daté de ce mercredi 30 mars et de nombreuses dépêches AFP. C’est aussi l’abattoir où se fournissent les stars des fourneaux Alain Ducasse, Yves-Marie Le Bourdonnec et plus modestement les AMAP (associations pour le maintien d’une agriculture paysanne).
C’est triste mais cela a eu pour effet d’attirer l’attention du ministre de l’agriculture qui jusque là estimait qu’il y avait des problèmes plus importants. Exact mais ce n’est pas une raison. Il a donc ordonné aux préfets de procéder d’ici un mois à des inspections spécifiques sur la protection animale dans tous les abattoirs de France. En savoir plus ici
Déjà une commission d’enquête parlementaire à l’initiative de députés et sénateurs de tous bords « sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français » est en cours depuis le 22 mars comme vous pouvez en prendre connaissance ici
Et après, l’émotion digérée, qu’en sera-t-il ? Cette question est posée par l’enquête que nous avions menée suite à la fermeture des abattoirs d’Alès (reouverts avant Nöel) pour maltraitance animale et abattage illégal ici
Quid des effectifs vétérinaires jugés insuffisants pour assurer la surveillance des abattages mais aussi la sécurité sanitaire ? Et les conditions de travail ? Veut-on ainsi supprimer les abattoirs de proximité (bien utiles aux éleveurs) pour d'énormes abattoirs dans lesqules l'omerta règle ?
De plus ce n’est pas qu’une question de maltraitance animale mais aussi sanitaire ou ça peut le devenir. En effet, les photos sont parlantes et pas rassurantes pour le consommateur surtout dans un abattoir bio "made in France, LB, IGP ! D'ailleurs la Confédération française de la Boucherie avait demandé une commission d'enquête lors de la fermture des abattoirs de La Vigan, c'est dire. Voici son communiqué
Les vétérinaires sanitaires ont également pris position à ce sujet comme vous pouvez le lire ici
La seule annonce positive provient d’une lettre du premier ministre à l’OABA (association de défense des animaux dans les abattoirs), datée du 22 mars, suite à une interpellation par 11 ONG de protection animale le 26 février 2016. Celui s’engage a créé 60 postes d’inspecteurs vétérinaires dans les abattoirs... en 2017.  120 avaient été créés en 2014 et 2015 mais ne compensent pas les 1 000 emplois de vétérinaires supprimés entre 2004 et 2014 !
Cette lettre n’est toutefois pas rassurante puisque le premier ministre indique que « le gouvernement entend veiller au respect par les professionnels de l’abattage de la directive européenne du 20 juillet 1998 concernant le protection des animaux dans les élevage ». C’est ignoré l’existence du règlement européen 1099/2009 du 24 septembre 2009 téléchargeable ici relatif à la protection des animaux lors de leur mise à mort.
Pour cette raison l’OABA a engagé des poursuites judiciaires nationales et européennes. Elle insiste pour que les effectifs vétérinaires soient immédiatement renforcés  aux postes d’abattage de tous les abattoirs et que les infractions soient sanctionnées sévèrement.
De son côté, l’association L214 a porté plainte auprès du tribunal de grande instance de  Pau pour maltraitances, sévices graves et actes de cruauté envers les animaux.
Elle demande une transparence effective de tous les abattoirs via la mise à disposition publique des rapports d’inspection, l’accès libre et inopiné des abattoirs aux associations de défense des animaux (c’est aussi une revendication et une raison d’être de l’OABA), la pose de caméras sur tout le parcours des animaux dans les abattoirs jusqu’à leur mise à mort qui doit se faire dans la légalité.

Rappel des règles d’abattage dans les abattoirs

La loi dit bien que les abattoirs agréés doivent être conçus, construits, entretenus et utilisés de manière à épargner aux animaux toute excitation, douleur et souffrance évitables (articles R214-67 à R214-72 du code rural).
Cela veut dire qu’il doit être procédé dans cet ordre :
- immobilisation par un procédé mécanique conforme de l’animal qui ne doit en aucun cas être suspendu avant d’être étourdi et mis à mort ;
- étourdissement de l’animal après immobilisation et avant mise à mort ;
- saignée le plus tôt possible après l’étourdissement et avant que l’animal ne reprenne conscience.
Dérogations
Ce procédé est quelque peu différent dans les cas suivants :
- les volailles et les lapins peuvent être suspendus avant étourdissement,
- l’étourdissement après immobilisation n’est pas obligatoire lorsqu’il s’agit d’abattage rituel,
- la mise à mort sans saignée des volailles et lapins (lagomorphes) peut être remplacée par des méthodes traditionnelles reconnues,
- la mise à mort d’urgence d’un animal dangereux.
L’abattage rituel
Certes les fêtes musulmanes (Aïd) et juives permettent aux éleveurs ovins-caprins de mettre un beau morceau de beurre dans leurs épinards. Cependant ce n’est pas une raison pour abattre les animaux n’importe où et n’importe comment. Déjà que ce rite bénéficie d’une dérogation, celle de la mise à mort de l’animal sans étourdissement.
La loi est formelle (articles R214-70, R214-73 à R214-75 du code rural), l’abattage rituel doit être exécuté dans un abattoir agréé par un sacrificateur agréé par un conseil régional du culte sous la responsabilité du préfet. Pas question d’abattage à la ferme, à domicile ou dans un abattoir clandestin.
L’abattage devant être pratiqué dans un abattoir agréé y compris temporaire agréé par le préfet, il est procédé comme indiqué ci-dessus. Sauf que l’étourdissement n’est pas obligatoire. Il est toutefois OBLIGATOIRE si le matériel de contention fait défaut ou n’est pas aux normes comme par exemple une simple berce.
Il va de soi que l’immobilisation par un procédé mécanique doit être maintenue pendant la saignée.
Par contre pas de dérogation à la suspension avant mise à mort, c’est interdit.

La police a eu la main très lourde au lycée Bergson

La police a eu la main très lourde au lycée Bergson

Mehdi Fikri
De Paris à Nantes, en passant par Lyon (notre photo), les dénonciations d’agressions se multiplient depuis jeudi dernier.
Photo : Robert Pratta/reuters
Au-delà du cas médiatisé du jeune Adan, de nombreux élèves de cet établissement parisien ont été victimes d’une féroce répression. Les témoignages s’accumulent et la FCPE réclame une « véritable enquête ».
Une élève noire traitée de « pute » par une policière, un autre menacé par un agent de la BAC : « On peut vous frapper jusqu’à la mort ! » L’intervention policière du jeudi 24 mars, devant la cité scolaire Bergson, dans le 19e arrondissement parisien, n’en finit plus de surprendre par sa violence. Les images du jeune Adan, 15 ans, recevant sans raison un coup de poing au visage, ont rapidement fait le tour des réseaux sociaux, allant jusqu’à « choquer » le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Cette agression fera l’objet, a promis le préfet de police de Paris, d’une enquête de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN). Mais depuis, d’autres vidéos sont venues montrer que cette « bavure » était loin d’être un cas isolé. Une multitude d’élèves de Bergson ont fait l’objet, ce jour-là, de coups de matraque injustifiés, de « balayettes » ou encore de gazages intempestifs à la lacrymogène. D’après Ilies, un des lycéens, certains policiers auraient également proféré des menaces « de mort ou de viol ».

Déshabillé et laissé en caleçon

La FCPE de l’établissement relaie nombre d’images de jeunes plus que malmenés par les forces dites de sécurité. Une des vidéos montre un policier en civil, capuchonné et sans brassard, distribuer des coups de matraque dans le dos d’élèves qui se dispersent tranquillement. Sur une autre, un agent tacle un jeune qui sortait du bahut, puis on voit un autre assis sur un muret, se faire attraper, coller au sol et embarquer sans ménagement. Il s’agit vraisemblablement de « Steven » (1), un mineur isolé qui vit en foyer et dont le sort inquiète particulièrement la FCPE. « Il été placé jeudi en garde à vue et il a passé la journée au commissariat. D’après les témoignages, il aurait été déshabillé et laissé en caleçon », s’indigne Isabelle Konopnicki, une parente d’élève. Il n’a été relâché qu’une trentaine d’heures plus tard, sur intervention du maire du 19e arrondissement. Le jeune, blessé, s’est vu octroyer deux jours d’ITT à sa libération. « Le comble, c’est que les policiers, de leur côté, ne se sont pas privés de porter plainte contre lui ! » ajoute Isabelle Konopnicki. La FCPE s’interroge également : pourquoi la brigade anticriminalité – la BAC – a été dépêchée devant le lycée ? « Ce sont les jeunes qui manifestent que l’on traite comme des criminels ? » s’insurge la parente d’élève. Pour elle, la hiérarchie policière a visé spécifiquement Bergson. « Les policiers n’agissent pas au hasard. C’est un collège-lycée populaire, avec de nombreux élèves issus de l’immigration. » Et il est généralement à la pointe des mouvements de contestation.
Un autre témoignage qui circule sur Internet renseigne sur l’ampleur des exactions policières. Anne-Sophie, une habitante de la rue Pailleron, a assisté à tout depuis la fenêtre de son appartement. Elle parle de la « brutalité systématique ». Notamment à l’encontre d’un « garçon de 14 ou 15 ans », « passé à tabac sur la chaussée (…) par au moins quatre policiers, lesquels s’acharnaient sur lui à coups de matraques, deux d’entre eux le frappant sur le corps et en plein visage, tandis que deux autres le rouaient de coups de pieds, d’abord dans les jambes pour le faire tomber – à deux reprises – puis dans les flancs alors qu’il était déjà à terre. Je suis aussitôt intervenue en criant par la fenêtre, mais ils ne m’entendaient pas (…). De force, ils ont relevé le garçon complètement sonné, titubant, et l’ont emmené. » Anne-Sophie évoque également une jeune fille recevant « des coups de matraque provoquant sa chute, puis l’acharnement sur son corps alors qu’elle avait chuté »…
Plusieurs plaintes ont été déposées par des parents d’élèves. Et la FCPE demande qu’une « véritable enquête » soit menée. En attendant, Ilies, le lycéen, s’inquiète : « J’espère que la police ne remettra pas ça lors du blocage prévu ce jeudi. »