mercredi 31 août 2016

Panama Papers : le Conseil européen met des bâtons dans les roues de la commission d’enquête

Panama Papers : le Conseil européen met des bâtons dans les roues de la commission d’enquête

 
Photo Rodrigo Arangua/AFP
Par Patrick Le Hyaric, député au Parlement européen
A peine débutés, les travaux de la Commission d’enquête spéciale sur l’évasion fiscale dite « Panama Papers » sont déjà menacés par l’exécutif européen.
 
Jusqu’à présent, c’était en général la Commission qui trainait des pieds lorsqu’elle devait nous fournir des documents confidentiels. Il est vrai que son président Jean-Claude Juncker était indirectement visé dans l’affaire Luxleaks, puisque Premier ministre du Luxembourg au moment des faits. Désormais, c’est le Conseil, qui représente les gouvernements européens, qui veut nous empêcher d’enquêter. 
 
Un document interne confidentiel de son service juridique cherche tous les moyens pour délégitimer notre travail d’enquête et justifier les futurs refus de répondre à nos questions et demandes de transmissions d’informations. Compte tenu de l’ampleur de la fraude fiscale et de la probable participation de certaines administrations fiscales européennes, on en comprend les motivations profondes.
 
Ainsi, plutôt que de se remettre en question, le Conseil veut semer le doute sur notre commission d’enquête à travers une série d’arguties juridiques : la création de la commission d’enquête ne respecterait pas les prérequis légaux, le mandat qui nous a été donné par le Parlement serait beaucoup trop vague, et les États ne pourraient donc pas se préparer aux questions de notre commission. 
 
Pire, la note nous demande de rester « mesurés » dans nos requêtes (probablement pour ne pas trop déranger les administrations fiscales des paradis fiscaux européens) et rappelle aux États qu’ils ne sont pas obligés de répondre à toutes nos questions, considérant que la fiscalité fait partie de leurs compétences exclusives. Elle propose même à ces derniers d’adopter une « approche coordonnée » vis-à-vis de notre commission d’enquête, un autre mot pour le maintient de la loi du silence.
 
Nous aurons une année pour tenter de faire la lumière sur les manquements, les fraudes et responsabilités des administrations fiscales dans le scandale des « Panama Papers », ainsi que sur leur dimension systémique. Cette première réaction des classes dirigeantes européennes montre que nos travaux d’enquête vont gêner. Nous devrons tirer tous les fils de ce système prédateur. J’y veillerai.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire