mercredi 19 octobre 2016

Rencontres de Tours. Le monde du rail lance un appel à un État stratège

Rencontres de Tours. Le monde du rail lance un appel à un État stratège

Marion d’Allard
Mercredi, 19 Octobre, 2016
L'Humanité
  
En 2016, le taux de fréquentation des TER a chuté en moyenne de 4,4 %.
En 2016, le taux de fréquentation des TER a chuté en moyenne de 4,4 %.
Photo : AFP
À Tours, les acteurs du ferroviaire ont débattu des enjeux de la filière, du service public et de stratégie industrielle.
Le débat est né d’un paradoxe : alors que les besoins en matière de transports ferroviaires ne cessent d’augmenter, les dotations publiques, elles, diminuent. Pourtant, « le ferroviaire est bien d’intérêt général », rappelle Patrick Le Hyaric, directeur de l’Humanité et député européen, en introduction des 12e rencontres de Tours, coorganisées par notre journal. Et il n’est plus tenable de « continuer à défendre l’accord de Paris sur le climat tout en valorisant des modes de transport qui ne respectent par l’environnement », camions pour le fret et cars Macron pour les voyageurs. Au confluent des problématiques économique, sociale et environnementale, la situation du rail – plombé d’une dette de près de 50 milliards d’euros – mérite désormais « des décisions fermes et des actes », réaffirme pour sa part Jean-Michel Bodin, ancien vice-président PCF de la région Centre en charge des transports.

Des années de hausse

Comment articuler le service public national et ses déclinaisons régionales en répondant aux besoins des usagers, ces « ayants droit aux transports », comme les appelle Jean-Luc Gibelin, vice-président PCF d’Occitanie en charge des transports ? C’est la question centrale qui a agité les discussions d’hier. Cette année, le taux de fréquentation des TER a chuté en moyenne de 4,4 %. Un chiffre significatif après des années de hausse et une augmentation de 35 % de l’offre depuis le transfert de compétences aux régions. Pour Gilbert Garrel, la réponse à cette baisse est dans les politiques conjointes menées par la direction de la SNCF et l’État. Trains supprimés ou retardés pour travaux, fermetures de lignes et de guichets… « Tout est fait pour détourner les usagers du train », a accusé le secrétaire général de la CGT des cheminots. Et, selon lui, ajouter encore des compétences aux régions – c’est le cas de certaines lignes nationales (TET) – ne changera rien. Au contraire. « On est passé d’une bonne loi de décentralisation qui maintenait un service public national à une régionalisation catastrophique qui va créer de réelles inégalités entre les territoires. » À ses côtés, Jacques Auxiette, ancien président PS des Pays de la Loire, acquiesce. « Il nous faut une vision de long terme, une véritable stratégie ferroviaire sur vingt ou trente ans. » Mais surtout, il est grand temps de sortir de l’idée d’un service public « rentable », explique Évelyne Didier, sénatrice PCF de Meurthe-et-Moselle. « L’État se comporte avec la SNCF comme un propriétaire qui n’entretient plus sa maison. Et lui demande, en plus, de faire de l’argent. » L’addition, elle, est à la charge des usagers et des cheminots.
La spirale du déclin ferroviaire se répercute jusque dans l’industrie
Même si l’État « fait mine de découvrir les problème auxquels Alstom est confronté », note Gilbert Garrel, le problème des ruptures de charge n’est pas nouveau. « Nous n’avons aucune visibilité », a répété hier Laurent Bouyer, président de Bombardier Transport France. Selon lui, pour éviter la casse industrielle, l’une des clés serait que l’Europe se dote, à l’instar des États-Unis, de l’Afrique du Sud ou de l’Inde, d’un système législatif qui garantisse l’emploi en France pour tout marché conclu avec un pays étranger. Il y a urgence. Car, rappelle-t-il, « les deux programmes sur lesquels nous travaillons pour la RATP se terminent cette année, deux autres en 2018 et 2019. Sans parler des contrats signés qui ne vont pas à leur terme ». Et de conclure, à toutes fin utiles, que des quelque 2 000 salariés du site Bombardier de Crespin (Nord) dépendent 6 000 salariés d’entreprises sous-traitantes.

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