lundi 28 décembre 2015

Juliette Gréco, une «Jolie môme» en liberté

Juliette Gréco, une «Jolie môme» en liberté

Victor Hache
Dimanche, 27 Décembre, 2015
Humanite.fr

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DR/ France 2
France 2 diffuse le 30 décembre le documentaire «Juliette Gréco, une femme libre». Un portrait sensible et émouvant qui retrace le parcours de l’icône de la chanson, pour finir l’année 2015 en beauté.
Parviendra-t-on un jour à percer le mystère Gréco?  Le  documentaire «Juliette Gréco une femme libre»*  diffusé le 30 décembre sur France 2, tente de cerner la personnalité d’une artiste qui a placé sa vie sous le signe de la liberté.
« C’est peut-être parce que je ne m’attendais à rien que tant de choses me sont arrivées » dit elle en ouverture de ce portrait où se mêlent images d’archives, extraits de chansons et témoignages de proches.
 A 88 ans, l’icône de la chanson garde le sourire d'une jeune fille. Elle l'est restée dans sa tête et force l'admiration de Stéphane  Bern qui raconte le parcours de la muse de Saint-Germain-des-Prés. Le parti pris de la liberté qui traverse ce documentaire émouvant et sensible traduit bien la philosophie d'une femme et d'une artiste qui n'aura jamais cédé au conformisme. Gréco depuis ses débuts n'en n'a fait qu'à sa tête, comme ça, pour le plaisir de se sentir pleinement exister.
Bien sûr il y a des blessures, celles de l'enfance. Juliette entretenait des rapports complexes avec sa mère : « Je suis une enfant pas du tout désiré » raconte-t-elle. Elle n’était pas faite pour l’amour maternel lui demande-t-on? «Non. Elle était faite pour l’armée, pour le combat, pour l’héroïsme, sans savoir que les mères de famille, elles, sont héroïques aussi. C’est une mère absente ».
Enfant, Juliette était timide, toujours dans son monde et parlait peu. Elle rêvait de devenir danseuse : « Je suis entrée à l’Opéra comme rat ! » sourit-elle. Ses parents étant séparés, élevée avec sa sœur aînée Charlotte par ses grands-parents maternels près de Bordeaux, elle se souvient de l’amour de sa grand-mère et de son grand-père pour qui elle avait une immense affection: « C’était un homme généreux, un homme tendre. Je comptais sur lui tout le temps. Le jour où il est parti, il a emporté mon enfance avec lui ».
En 1939, c’est la guerre et sa mère s’engage dans la Résistance. Elle sera arrêtée en 1943 ainsi que sa sœur, puis déportées dans les camps de Ravensbrück, dont elles ne reviendront qu’en 1945,  tandis que Juliette, en raison de son jeune âge, sera envoyée à la Maison d’arrêt de Fresnes. A sa sortie, elle a 16 ans. Seule et sans argent, elle trouve refuge auprès d’une amie de sa mère, la comédienne Hélène Duc qui avait été sa professeur de Français à Bergerac. Une période où elle va suivre des cours de théâtre, sans même imaginer qu’elle deviendrait chanteuse un jour.  A la Libération, à Paris, c’est l’effervescence et avec elle l’envie de la jeunesse de se sentir vivre. Juliette découvre le bouillonnement culturel de la rive gauche et fréquente le Café de Flore, les deux  Magots et les nombreux cabarets de  Saint-Germain. Cheveux longs, frange au carré pull et pantalon noirs, elle fascine par son allure, sa manière originale et hors normes de se comporter. Charles Trenet, Léo Ferré, Georges Brassens, Jacques  Brel… tous  rêvent d’écrire pour elle. A l’image de  Serge Gainsbourg qui lui  offre la chanson «La  javanaise». Elle chantera aussi la sensuelle et provocante «Déshabillez-moi», titre phare de son répertoire écrit en 1967 par  Robert Nyel et Gaby Verlor, qu’elle continue d’interpréter avec humour : « Je trouve ça marrant et qui plus est, ça me donne l’impression à moi, d’être tranquillement impudique ».
Vous étiez coquine remarque Stéphane Bern, « Moi ? Je ne suis pas coquine, je suis infernale ! ».  Tour à tour, amante, maitresse et éternelle amoureuse, à 19 ans, elle rencontre le champion automobile Jean-Pierre Wimille, qui se tuera quelques temps après lors d’une course en Argentine. Elle partagera  la vie du comédien Philippe Lemaire avec qui elle aura une fille Laurence, du Jazzman Miles  Davis, du producteur américain Darryl Zanuck qui lui donna les plus beaux rôles au cinéma aux Etats-Unis, de l’acteur Michel Piccoli et connut une amitié très complice avec Françoise Sagan. Marié avec l’ancien pianiste de Jacques Brel, Gérard Jouannest, son partenaire de scène depuis  47 ans, elle n’a jamais cessé, depuis ses débuts au cabaret Le Bœuf sur le toit, de vouloir servir les textes des plus grands auteurs, de Jean-Paul Sartre, Merleau-Ponty à Jacques Prévert ou Boris Vian. « Mon métier, c’est interprète de luxe ! » s’amuse celle qui s’est toujours considérée comme la «servante» des mots des autres. 
Libre, rebelle, femme engagée et magnifique interprète, après 70 ans de scène, elle a entamé une tournée  d’adieux baptisée «Merci». Merci à son public,  à la poésie, à la chanson, à l’amour et au miel de la vie. Un dernier tour de chant commencé au printemps 2015 qui se poursuivra en 2016 avec plusieurs grands rendez-vous, à l’Auditorium du Louvre (5 et 6 février), au Théâtre de la Ville à Paris (7 février), au Casino de Paris (17 avril)  mais aussi au Japon ou à Londres en juin. Chapeau et respect Juliette!
 
«Juliette Gréco, une femme libre»* de Valérie Inizian et  Jérôme Bréhier, diffusion mercredi 30 décembre sur France 2, 23h20

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