mercredi 16 décembre 2015

Régionales. Derrière le bleu et le rose, le FN grignote l’espace

Régionales. Derrière le bleu et le rose, le FN grignote l’espace

Sébastien Crépel
Mardi, 15 Décembre, 2015
L'Humanité
  
Photo : Jeff Pachoud/AFP
Progression du FN qui crève son plafond de 2012, victoire par défaut de la droite, délabrement de la gauche dont le recul dramatique en voix rend urgente une complète refondation loin des recompositions politiciennes à courte vue électorale… état des lieux après le scrutin.

Les 3,85 millions d’électeurs en plus à s’être rendus aux urnes, dimanche, ont sans doute évité une catastrophe au pays, avec l’élection de présidents et de majorités Front national dans une à trois régions, si ce n’est plus. Le sursaut de participation observé (58,4 %, + 8,5 points par rapport au premier tour) a ainsi réconforté ceux qui redoutaient une complète banalisation du FN au point de le laisser s’emparer dans l’indifférence de leviers importants du pouvoir.
Plus 11 points de votants en Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine ; + 10 en Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire et Lan-
guedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées ; + 9 en Auvergne-Rhône-Alpes et Normandie ; + 8 en Corse, Île-de-France et Paca ; + 7,5 en Pays de la Loire ; + 7 en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes et + 6,5 en Nord-Pas-de-Calais-Picardie...
Pourtant, le paysage électoral montre une réalité plus préoccupante que ce que laisse apparaître la carte des couleurs politiques des nouveaux exécutifs régionaux (sept régions à droite pour cinq à gauche, et une aux nationalistes corses). État des lieux d’un scrutin.


1 La droite ne progresse vraiment que dans deux régions sur treize

Avec sept régions sur treize emportées dimanche (Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, Auvergne-Rhône-Alpes, Île-de-France, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Normandie, Pays de la Loire, Paca), qui agglomèrent douze anciennes régions sur 22, soit un gain de onze régions (elle dirigeait la seule Alsace jusqu’à présent), la droite a procédé à un rééquilibrage spectaculaire dimanche. Avec 40,2 % dimanche, contre seulement 31,7 % le 6 décembre, soit un gain de 3,2 millions de voix entre les deux tours, la droite « Les Républicains » (LR)-UDI-Modem apparaît confortée. Observés de près, les résultats montrent pourtant une tout autre réalité.
Si on compare les résultats d’un second tour des régionales à l’autre, la droite apparaît considérablement gênée par les triangulaires provoquées par le FN dans toutes les régions cette année (contre « seulement » dans 12 sur 22, il y a cinq ans). Le score de la droite est en baisse dans six régions sur treize : Bourgogne-Franche-Comté (32,9 %, -3 points), Bretagne (29,7 %, -3), Centre-Val de Loire (34,6 %, -1), Corse (27,1 %, -1), Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées (21,3 %, -9), toutes régions qu’elle a échoué à conquérir, et même en Pays de la Loire qu’elle a pourtant conquise (42,7 %, -1). Dans deux autres régions qu’elle a gagnées dimanche, sa victoire a masqué la modestie des progrès : c’est le cas en Île-de-France (43,8 %, + 0,5 sur 2010, en duel face à Jean-Paul Huchon à l’époque) et en Normandie (+0,2).
Si on ôte enfin les trois régions où ses gains sont essentiellement imputables à l’effet du « front républicain » sur ses candidatures (Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Paca), la droite ne progresse substantiellement que dans deux régions sur treize : Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, restée à gauche, mais où Virginie Calmels obtient 34,1 % (+ 2 points sur 2010), et surtout Auvergne-Rhône-Alpes, où Laurent Wauquiez, qui a enlevé la région au PS Jean-Jack Queyranne, obtient 40,6 % (+ 5 points sur 2010). Pas de quoi plastronner, ni en tirer de validation définitive d’une ligne plus ou moins droitière ou centriste.

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