lundi 5 septembre 2016

Le climat, dernier souci du G20 en dépit des apparences


Le climat, dernier souci du G20 en dépit des apparences

Gérard le Puill
Lundi, 5 Septembre, 2016
 
PHOTO HOW HWEE YOUNG/AFP
Avant même l’ouverture du G20 à Hangzhou, le président chinois Xi Jinping et son homologue américain Barack Obama avaient annoncé au monde que leur pays, responsables à eux deux de 40% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), avaient ratifié l’accord de Paris sur le climat. Mais la suite des débats a montré que le commerce mondialisé, sur fond de concurrence polluante et mortifère, gardait la priorité sur les enjeux climatiques.
Certes, l’ordre du jour de ce G20 n’est pas consacré au changement climatique. Mais freiner le réchauffement impliquerait de conduire l’économie mondiale différemment. Rappelons à ce propos que l’accord de Paris adopté voilà neuf mois se donne pour objectif de limiter le réchauffement climatique à +2°C d’ici la fin du siècle en cours par rapport au début de l’ère industrielle, ce qui suppose de diviser par quatre les émissions de GES d’ici 2050. Mais on sait que signer un accord de suffit pas pour inverser la tendance. La Chine qui large quelques 22% des GES promet d’inverser sa courbe d’émissions en 2030. Toutefois, dans le cadre du G20, la Chine veut exporter toujours plus d’acier et de produits finis pour faire tourner ses usines dont beaucoup sous-utilisent aujourd’hui leurs capacités de production dans la mesure où les donneurs d’ordre de la grande distribution des pays développés font désormais délocaliser des productions de Chine vers de pays à plus bas coûts de main d’œuvre. Voilà qui augmente encore le bilan carbone de chaque bien produit dans un processus dit de « destruction créatrice » tous comptes faits plus destructeur de capital productif que créateur de nouvelles richesses.
 
 Les Etats Unis, avec environ 18% des émissions promettent surtout de réduire la place du charbon dans leur mix énergétique. Mais comme c’est au profit du gaz et de pétrole de schiste tout en exportant du charbon, on peut avoir des doutes sur la portée à venir de l’engagement américain sur la réduction des émissions de GES. Outre qu’elle pollue beaucoup à travers le processus d’extraction, l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste aux Etats Unis est à l’origine de la déstabilisation mondiale du marché du gaz et du pétrole , la baisse des prix faisant aussi augmenter la consommation d’énergies fossiles alors qu’il est urgent d’en diminuer les volumes utilisés chaque jour sur la planète pour freiner le réchauffement.
Le sujet central de ce G20 en Chine est la relance du commerce international dont le rythme de progression n’est plus que de 3% par an depuis la crise financière de 2008-2009 alors que cette progression était de 7% par an lors des deux décennies précédentes. Mais la relance des échanges à travers le monde, sur fond de concurrence gaspilleuse de capital productif et de surexploitation du personnel des usines et des chantiers, est-il compatible avec la réduction des émissions de GES afin d’avoir une chance d’atteindre l’objectif retenu par l’accord de Paris pour contenir le réchauffement ?
 
Personne ne semble vouloir évoquer un tel sujet au sommet du G20 à Hangzhou dans l’est de la Chine. A propos du TAFTA ou TTIP, une dépêche d’agence nous indique que Barack Obama est venu à ce sommet « afin de donner un coup d’accélérateur pour boucler cet accord avec Bruxelles avant son départ de la Maison Blanche en janvier ». Mais, toujours selon la même dépêche, « le candidat républicain à la Maison Blanche Donald Trump, mais aussi sa rivale démocrate Hillary Clinton, ont d’ores et déjà exprimé leur opposition à de futurs accords comme celui actuellement négocié avec l’UE ».
Champion toutes catégories dans l’entretien de l’ambiguïté, François Hollande a déclaré à sa descente d’avion en Chine : « La France est pour une mondialisation, mais à condition qu’elle soit régulée, qu’il y ait des principes, des normes, notamment pour l’environnement, le social ». Or l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui donne le cadre juridique de ces négociations, ne prévoit aucune norme sociale ni environnementale dans les négociations commerciales. François Hollande le sait et n’a pas demandé en Chine l’arrêt des négociations entre l’Europe et les Etats Unis, même si son Premier ministre et son secrétaire d’Etat en charge du commerce extérieur ont été autorisés à suggérer cet arrêt des négociations voilà quelques jours. 
 
En Chine toujours, Jean-Claude Juncker a fait savoir que la Commission européenne avait toujours un mandat donné par tous les pays membres de l’Union européenne pour négocier cet accord de libre échange avec les Etats Unis. « Il n’y a rien de neuf sous le soleil », a-t-il ajouté. Il répondait ainsi à François Hollande, mais aussi à Angela Merkel, qui, pressentant une défaite électorale de son parti en Poméranie avait déclaré depuis la Chine : « La mondialisation n’a pas qu’une connotation positive, elle entraîne aussi des inégalités accrues entre différents groupes, différentes populations. La lutte contre les inégalités est un thème important pour durablement lier croissance et justice sociale ». 
Alors que le G20 fait l’objet de quelques déclarations hypocrites des européens sur la nécessité de mieux concilier la croissance mondiale et les échanges avec le progrès social, les enjeux climatiques continuent d’être évacués par une Europe qui n’a toujours pas de projet équilibré et pertinent de répartition de la réduction des émissions de GES dans chacun des pays membres d’ici avril 2017. Il s’agit pourtant de la date limite pour la ratification de l’accord de Paris. Dans ce domaine non plus, l’Union européenne, qui compte pour une Partie sur les 195 qui ont adopté le texte de la conférence de Paris en décembre 2015, ne paie vraiment pas d’exemple.

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