lundi 19 décembre 2016

Dix cadeaux de Noël à la page pour les lectrices et lecteurs de l'Humanité

Dix cadeaux de Noël à la page pour les lectrices et lecteurs de l'Humanité

Laurence Mauriaucourt
Samedi, 17 Décembre, 2016

Le peintre Philippe Hollevout sur son bateau, dans le Nord (Photo Margaux H)
A partir de ce lundi 19 décembre et durant deux semaines, la dernière page de l'Humanité laisse carte blanche à deux créateurs. L'écrivain, Christian Laborde, et le peintre, Philippe Hollevout. Portraits en attendant cette magnifique série de dix pages inédites. 
Le peintre
Philippe Hollevout enlumine les textes de Christian Laborde dans l’Humanité en cette fin d’année 2016. Un peintre toujours prêt à croquer le vivant depuis son bateau ancré dans le Nord.
Philippe Hollevout voit le jour à Châlons-en-Champagne, en 1959. Le 59, c’est aussi le département du Nord. Où il flotte avec Valou, son épouse, son jeune fils Lulu et Popeye, le chien, sur l’Ovni, un petit bateau, dans le port de Wambrechies près de Lille. Du neuf, il en a créé tous les jours, pendant vingt ans dans l’atelier-boutique de la rue Royale à Lille. Le changement, ça ravigote. Il a quitté les lieux, il y a quelques semaines, et travaille désormais dans la cale aménagée de sa pénichette.
Créer, c’est à ce prix qu’on dompte le bonheur ! Le solide gaillard s’impose quotidiennement une gymnastique intellectuelle qui lui vaut de produire au moins un dessin par jour depuis des années. Un dessin ou autre. Car, s’il aime produire sur toile, carton, bois, le peintre a embrassé toutes les possibilités offertes par les techniques numériques avec une avidité d’ogre. Chacune de ses œuvres réalisée au pinceau, au crayon, au feutre, au stylet de la palette graphique, à la guitare, au micro ou caméra au poing se love sur son site Internet ou sur son blog. Une matière où l’histoire familiale flirte avec les grands de ce monde, avec l’actualité, d’où qu’elle vienne. Une matière graphique où le moindre fait devient épopée poétique. Où le moindre événement se transforme en une image luxuriante de vie et d’émotions au caractère universel, intemporel.
Hollevout souffle magnifiquement le chaud et le froid de son monde. Enfant, il a vécu en Côte d’Ivoire. Peindre l’homme africain, la mer, le soleil est tout naturel. Adolescent, c’est du côté des plaines venteuses d’Armentières qu’il assume très vite son devenir d’artiste. Aussi, Hollevout ne se lasse-t-il pas de figurer le silence d’un paysage enneigé et ce vent du Nord qui décoifferait un chauve.
Observateur du vivant, transcripteur besogneux du réalisme onirique et absurde du monde, il confie être « honoré » de dessiner dans l’Humanité. « J’apprécie toujours cette démarche qui peut paraître banale d’associer deux artistes, l’image et le texte. Si je travaille la BD, le dessin de presse, la fresque, mes carnets de dessins, c’est pour cultiver cette association des mots et des images. » Et Hollevout de nous rappeler que nous avons tous appris à lire devant un dessin de pomme, associé au mot pomme. « J’aime l’aspect didactique du texte illustré. J’aime le support papier. Un journal papier reste un truc que tu vas acheter avec un sou et qui te permet, où que tu te trouves, de te raconter ton histoire. » « Quand je lisais Pif, enfant, je savais qu’il y avait les cocos derrière », se souvient-il, en petit-fils d’ouvrier communiste. Voilà, pour Hollevout, « dessiner, c’est avant tout un geste », un geste de soi vers l’autre. Vers l’autre soi. Merci ! (Laurence Mauriaucourt)
L'écrivain
Christian Laborde ne fréquente pas Le Flore. Ses livres tissent une œuvre littéraire des plus singulières. « À la réflexion, Laborde est un lascar des Lettres françaises », disait de lui Frédéric Fajardie...
Il est de ces écrivains qui sont à la ville comme à la campagne et en littérature. Vifs, drôles, toniques, un brin ironiques. Curieux des autres. Soucieux du monde qui ne tourne pas très rond. Christian Laborde, le cœur ouvert, la plume en alerte, est un boulimique des mots, un bouffeur de verbes. Il aime le vélo, la boxe, les vaches, les platanes, Nougaro, Lubat. Leur point commun ? Le swing. L’art de l’improvisation, leur lien indéfectible avec la terre, la glaise, la sueur. Mais Laborde aime aussi les femmes, la musique punk, les 2 CV, les Pyrénées, le Jurançon, fumer un clope en terrasse un verre à la main à l’ombre d’un platane…
Laborde est entré en littérature par effraction. Rien ne prédestinait ce jeune homme né à quelques encablures du col du Tourmalet à la littérature. C’est la vie, le bruit du torrent qui coule en bas du village, les blouses à fleurs de sa mémé, l’odeur enivrante des prés au printemps, la froidure de l’hiver, l’émerveillement de la caravane du Tour qui file à vive allure à hauteur d’enfant, le patois et les « r » qui roulent dans les rues d’Aureilhan, l’accent qui fout la honte mais qu’un poète, Nougaro, aura tôt fait de réhabiliter, qui ont fait que… D’autres deviennent forgerons ou enseignants, flics ou voyous. Laborde sera écrivain.
Lorsque paraît en 1987 l’Os de Dionysos, c’est l’émeute au parloir des gardiens de la morale du temple en robe de bure. Le livre provoque l’ire d’une partie de la communauté éducative et des curetons. Il sera censuré pour trouble à l’ordre public, incitation au désordre et à la moquerie, danger pour la jeunesse en pleine formation physique et morale, pornographie, lubricité, paganisme et, le plus chic, abus de mots baroques. Qu’à cela ne tienne. À la bêtise des censeurs, il réplique par deux recueils de poèmes, puis des romans, de nouveau. En parallèle, il collabore à l’Idiot international. Plus tard, et aujourd’hui encore, il chronique le Tour de France sur RTL. À Avignon l’été dernier, à la Fête de l’Huma cette année, au stand des Amis, il joue, fredonne, vit et respire Nougaro dans un spectacle entièrement cousu de chansons de son ami Claude, pour un hommage sincère, joyeux et désordonné au chanteur des Minimes. Ces derniers temps, il a publié coup sur coup deux ouvrages, la Cause des vaches (éd. du Rocher), plus qu’un pamphlet, un hymne à la vie, aux bêtes et aux honnêtes hommes. Et le Sérieux bienveillant des platanes (éd. du Rocher), une ode à l’amour, aux femmes, aux anciens, aux platanes… Écriture enfiévrée, sulfureuse et irrévérencieuse jusqu’au bout du point-virgule, qu’il aime à manier. Et vous tient en haleine jusqu’au point final…  (Marie-José Sirach)

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