mercredi 10 février 2016

Varoufakis lance un mouvement pour la démocratie européenne


Varoufakis lance un mouvement pour la démocratie européenne

ÉLISE THIÉBAUT
MERCREDI, 10 FÉVRIER, 2016
L'HUMANITÉ
L’ancien ministre des Finances grec Yanis Varoufakis a lancé, hier à Berlin, Diem 25, rassemblement transnational pour sortir de l’austérité en Europe. Il développe des solutions fédéralistes pour faire face à la crise et reconstruire les institutions continentales.
Berlin (Allemagne), correspondance.
Varoufakis a lancé hier à Berlin son Mouvement pour la démocratie en Europe : Diem  25. À la légendaire Volksbühne de Berlin, l’ancien ministre des Finances du premier gouvernement Syriza rebondit après une année 2015 qui a vu le printemps grec se fracasser sur le mur de l’austérité européenne. Wolfgang Schäuble, ministre des Finances allemand, avait résumé la chose en une phrase : « Il n’est pas possible de laisser des élections changer le cours des choses. » Si les élections ne changent pas le cours des choses, qui peut le faire ? Pour Yanis Varoufakis, « la volonté de changer l’Europe est peut-être utopique, mais on a l’obligation d’essayer. Car sinon, c’est la plus sévère des dystopies (contre-utopie – NDLR) qui va survenir : celle que l’on a connue dans les années 1930 ». La montée de l’extrême droite et l’échec des gauches ne peuvent aboutir, il en est certain, qu’à la désintégration de l’Europe. C’est pourquoi, dans la petite salle de la Volksbühne bondée, il veut ouvrir le mouvement à tous les progressistes, démocrates, libéraux, écologistes pour unir les forces au-delà des dogmes et des clivages politiques ou nationaux.

Trois priorités pour élaborer cette plateforme politique transnationale

Une soixantaine de personnalités – artistes, activistes, intellectuels – participaient hier aux discussions, qui doivent poser les bases d’une action commune. Katja Kipping, coprésidente de Die Linke, Caroline Lucas, députée britannique verte, Ada Colau, maire Podemos de Barcelone, et même Julian Assange via Skype ont répondu à l’appel. Le manifeste publié par Diem la semaine dernière ne fait pas forcément l’unanimité, mais il fixe un cap censé favoriser l’« irruption de la démocratie ». Dans une prose délibérément floue, il fait apparaître trois priorités pour l’élaboration de cette plateforme politique transnationale. Le premier point est une exigence de transparence : retransmission en direct sur Internet des réunions des institutions européennes, publication des minutes et mise en ligne de tous documents sur les négociations cruciales, inscription obligatoire des lobbyistes… Le pari de Diem est que, si ces discussions étaient publiques, les décisions seraient différentes.
La deuxième partie du manifeste, ouvertement fédéraliste, entend s’attaquer à la crise européenne dans quatre domaines  : la dette, les banques, l’insuffisance de l’investissement et la montée de la pauvreté. « Ces quatre problèmes sont tous laissés aux mains des gouvernements nationaux, qui n’ont pas les moyens d’agir sur eux, affirme le manifeste. Diem 25 présentera des propositions détaillées pour les européaniser tous les quatre, tout en limitant les prérogatives arbitraires de Bruxelles et en rendant le pouvoir aux parlements nationaux, aux conseils régionaux, aux municipalités et aux communautés de base. Les mesures proposées viseront à redéployer les institutions existantes (par réinterprétation créatrice des chartes et traités existants) pour stabiliser les crises de la dette publique, des banques, de l’insuffisance des investissements et de la montée de la pauvreté. » La créativité sera-t-elle au rendez-vous ? Les propositions détaillées à venir nous le diront. Parmi les propositions concrètes, on notera celle de la coprésidente de Die Linke, Katja Kipping, qui a choisi de rejoindre Diem 25 : la création d’un fonds européen pour donner aux pays qui le souhaitent les moyens d’accueillir les réfugiés. Lors des débats de la première session, Corinne Morel Darleux, secrétaire nationale au développement international de l’écosocialisme du Parti du gauche, soulignait cependant ce 9 février la nécessité d’avoir une vision systémique pour trouver une solution à long terme à la crise européenne : « Il faut aller à la racine de la crise des réfugiés et dénoncer ce qui à présent reste dans l’angle mort de nos analyses, à savoir l’accès aux ressources énergétiques. La maîtrise énergétique n’est pas qu’un enjeu environnemental, mais aussi politique, géopolitique, démocratique, puisque ces richesses sont aux mains d’une oligarchie toute-puissante, et qu’elles sont la cause de toutes les guerres que nous connaissons aujourd’hui. »
Le troisième volet du manifeste appelle à la création d’une assemblée constituante composée de représentants élus sur des listes transnationales pour « transformer l’Europe (à l’horizon 2025) en démocratie pleine et entière, dotée d’un Parlement souverain qui respecte l’autodétermination nationale et partage le pouvoir avec les parlements nationaux, les conseils régionaux et les conseils municipaux ».


« Une république européenne » 
Le projet européen de Diem 25 promeut une intégration poussée de l’Union européenne. Présente hier, la politologue allemande Ulrike Guérot, directrice du Laboratoire de démocratie européenne, prônait : « Il faut créer non pas une démocratie, mais une République européenne garantissant le simple droit pour tous d’avoir le même accès aux mêmes droits sociaux partout en Europe. »

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