Quelle stratégie politique faut-il adopter pour l’élection présidentielle de 2017 ?
Candidature, rassemblement et projet
Mardi, 22 Novembre, 2016
L'Humanité
Avec les contributions d'Isabelle de Almeida, présidente du conseil national du PCF, André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme, Ian Brossat, membre du conseil national du PCF et Aymeric Seassau, membre du conseil national du PCF, en charge du secteur travail, emploi, entreprises.
- Être utile en prenant ses responsabilités par Isabelle de Almeida, présidente du conseil national du PCF

À ce stade, l’appel à voter Jean-Luc Mélenchon pourrait constituer un premier pas vers un rassemblement, certes partiel aujourd’hui, mais à partir duquel les communistes pourraient mettre leur énergie militante, leur démarche de rassemblement pour le rendre plus large et plus constructif. Aujourd’hui, c’est le choix qui est fait par une grande majorité d’électeurs du Front de gauche, qui approuvent les grands axes de propositions avancées par Jean-Luc Mélenchon. Celles-ci ne nous conviennent pas toutes, certes, mais puisque nous voulons construire un pacte d’engagements communs, il est plus urgent et nécessaire de pointer les convergences plutôt que les divergences, sinon aucun rassemblement ne pourrait se construire. Le choix d’appel à voter Jean-Luc Mélenchon, loin de nous enfermer dans un cadre, nous laisserait libres de poursuivre nos initiatives, notre démarche de rassemblement pour une candidature commune, en tenant compte de l’évolution de la situation politique.
Faire ce choix nous engage à entrer en campagne : en articulant les exigences populaires exprimées avec la consultation citoyenne, le pacte d’engagements communs pour la France et nos batailles nationales ; cela nous appelle à entrer en campagne pour les élections législatives, qui doivent être au premier plan de la vie politique. Dans quelle mesure des périmètres de rassemblement autour de candidatures qui seraient différentes à la présidentielle et aux législatives dans les circonscriptions constitueraient un problème ? Cela arrive régulièrement, tant les types d’élection et les modes de scrutin sont différents. Enfin, comment penser qu’une candidature communiste pourrait être vécue comme une proposition de rassemblement ? Certes, j’entends bien que celle-ci aurait pour vocation à interpeller citoyens et forces politiques de gauche pour favoriser l’émergence d’une candidature commune, et donc devrait se retirer si cela advenait ? Est-ce possible ? Je le souhaite, mais en étant lucide, aucun signe, y compris en ce lendemain d’élection de Trump, ne le laisse entrevoir.
Ce n’est pas parce que les autres font preuve d’irresponsabilité que nous devons faire de même ; ajouter de la division à la division ne réglera pas le problème, ni celui du pays, ni l’avenir de la gauche et du PCF. Au contraire, les électeurs-trices nous le reprocheront et ils auront raison !
Il est possible qu’en février, à la suite de la primaire du PS, nous puissions entrevoir d’autres choix. Il faudra évaluer, comme nous y invite la résolution, quel type de rassemblement est possible : large rassemblement ou rassemblement partiel, avec qui et sur quoi, autour de la candidature communiste ? Celle de J.-L. Mélenchon, d’un candidat socialiste frondeur issu ou non de la primaire, ou d’un autre ?
En tout état de cause, il faudra, à ce moment-là, favoriser un rassemblement porteur de ruptures avec les politiques libérales et qui engagera un combat contre la droite et l’extrême droite. C’est ainsi que le PCF sera utile, en prenant ses responsabilités face aux dangers pour le peuple et pour le pays.
- Nous, communistes par André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme

Alors que certains sont pressés d’enterrer les communistes et annoncent la fin de leur parti historique, nous sommes pourtant toujours vivants, debout, combatifs, force organisée et ouverte, présents dans les assemblées élues comme dans les combats menés par nos concitoyens. Nous, communistes, avons vocation à fédérer le peuple de gauche, à unir tous les progressistes et former ainsi un front uni contre les forces de l’austérité et de la xénophobie. Loin de toute ambition personnelle, nous pensons que les défis à relever sont collectifs : contrer à gauche la dérive libérale du Parti socialiste, empêcher le retour au pouvoir d’une droite extrême et faire face au danger du Front national, refuser l’abandon de l’idéal progressiste de notre contrat social hérité de la Révolution et de la Résistance. Il revient aux communistes, forts de leur histoire faite de luttes sociales émancipatrices, de porter aujourd’hui une candidature de la révolte face à la résignation, une candidature qui rassemble, dans le respect, tous ceux qui souhaitent incarner une alternative à la dérive libérale qui gangrène notre société et désespère les peuples. Une candidature qui portera l’exigence et l’urgence de mettre en chantier une société nouvelle. Une candidature qui n’affronte pas seulement la finance par les mots, mais par les actes, en s’appuyant sur les intelligences et les mobilisations sociales. Cette fin de semaine, par leur vote, les communistes se doivent de prendre leur responsabilité devant l’Histoire, notre Histoire.
- Pour rassembler, commençons par ne pas diviser… par Ian Brossat, membre du conseil national du PCF

Cette situation ouvre un boulevard à la droite et à l’extrême droite. Et ce, alors même que notre peuple ne s’est pas converti subitement à l’ultralibéralisme et au dieu argent. Il a rejeté massivement la loi El Khomri. Il se mobilise dans nos territoires pour défendre les services publics de proximité. Il refuse à plus de 75 % la suppression de l’impôt sur la fortune, comme en témoigne une récente enquête. Mais il ne voit rien venir de sérieux du côté gauche de l’échiquier politique.
Dans ce contexte, que faire ? Deux options nous sont proposées. La première est celle d’une candidature communiste à cette élection présidentielle. À mon sens, elle nous éloigne de la solution au lieu de nous en rapprocher pour deux raisons au moins. D’abord parce qu’elle serait perçue de fait comme une candidature de division. C’est sans doute injuste, mais c’est ainsi. Alors même que la gauche est déjà divisée, que nous n’avons cessé d’appeler au rassemblement le plus large depuis des mois, nous ajouterions une candidature supplémentaire à un paysage déjà très éclaté. Ensuite, je doute qu’il soit possible à six mois du premier tour d’improviser dans des conditions convenables une campagne présidentielle. Nous valons mieux que cela.
Certes, j’entends l’idée selon laquelle cette candidature pourrait être retirée avant le premier tour. C’est d’ailleurs ainsi qu’elle est formulée dans le bulletin de vote qui nous est soumis. Soyons précis. Un retrait pour qui ? Pour Valls, pour Hollande ? Nul n’y songe, et heureusement. Pour Montebourg ? Sincèrement, je nous vois mal soutenir un candidat qui propose la vente du patrimoine HLM et un Code du travail à deux vitesses selon qu’on travaille dans une grande entreprise ou une PME. S’agirait-il de se retirer pour Mélenchon ? Dans ce cas, pourquoi attendre ? La deuxième option qui s’offre à nous est celle d’un soutien à la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Nous avons beaucoup à redire sur la manière dont il a lancé sa campagne. Nous l’avons exprimé, et nous avons eu raison. Il reste qu’il rassemble aujourd’hui la quasi-totalité de ceux qui ont porté leur suffrage sur sa candidature en 2012, et au-delà. Le programme qu’il défend s’inspire en bonne partie de celui que nous avons défendu ensemble lors des échéances précédentes. C’est la raison pour laquelle ce choix me paraît le plus raisonnable et le plus susceptible d’être compris par ceux qui nous font confiance. Il ne s’agit pas de faire le choix du ralliement, mais celui du rassemblement.
- La gauche est morte, vive la gauche ? par Aymeric Seassau, membre du conseil national du PCF, en charge du secteur travail, emploi, entreprises

Jean-Luc Mélenchon propose une forme politique nouvelle et cohérente qu’il définit comme une « doctrine globale destinée à l’action ». « Notre populisme est un outil pour rassembler la très grande majorité des Français. (…) Je comprends les appréhensions face à cette stratégie novatrice que d’aucuns appelleront aventurière. Je comprends les préventions de ceux qui préfèrent “faire vivre le clivage droite-gauche” plutôt que d’alimenter, au moins conjoncturellement, sa décomposition », précise Raquel Garrido dans une adresse aux communistes publiée à la veille de leur conférence nationale.
Est-il possible pour les communistes de s’y associer, fût-ce par un appel à soutien accompagné d’une campagne autonome du PCF ? Je ne le crois pas. Pas par réaction aux propos inutilement blessants de son candidat mais parce que soutenir la France insoumise donnerait du poids à une stratégie politique qui n’est pas la nôtre : celle d’un parallélisme des formes, fond contre fond, front contre front, entre deux populismes opposés sur le projet mais prétendant tous deux dépasser le clivage droite-gauche.
Oui, nous voulons tenir la gauche debout ! En nous adressant sans relâche à celles et ceux, nombreux, qui se reconnaissent dans cette histoire, dans cette force commune, parmi lesquels des révolutionnaires, des réformistes, aujourd’hui des écologistes. En travaillant à rassembler la gauche pour écrire de nouveau le récit émancipateur des conquêtes politiques et sociales qui ont fait les plus belles pages de l’histoire de France.
Personne ne nie les difficultés qui restent sur notre chemin. Et personne ne garantit qu’en changer peut résoudre les problèmes graves auxquels est confronté notre peuple.
Ce que nous savons c’est que les communistes français n’ont jamais été si grands que quand ils ont tenu fermement le drapeau de l’union pour faire front face aux puissances d’argent et gagner des politiques utiles aux salarié-e-s et aux familles populaires.
Ce que nous savons c’est que le repli, les anathèmes caractérisés hier par la stratégie « classe contre classe » ont conduit les communistes dans l’impasse jusqu’à ce que le mouvement ouvrier ne rappelle la gauche à l’ordre pour construire le Front populaire. C’est cette ambition que résumait il y a quatre-vingts ans Maurice Thorez : « Le Parti communiste s’honore de n’obéir qu’à une préoccupation exclusive : servir la cause du peuple. Le Parti communiste s’honore de ne connaître qu’un seul mot d’ordre : UNIR. » Il y a de la fierté dans cet engagement bientôt centenaire. Unir donc… Et pour unir, il faut exister !
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