dimanche 4 décembre 2016

La BNP-Paribas sous le feu des actions militantes

La BNP-Paribas sous le feu des actions militantes

Marie-Noëlle Bertrand
Jeudi, 1 Décembre, 2016
Humanite.fr

Depuis un mois, les opérations dénonçant l’implication de la banque dans l’évasion fiscale se multiplient partout en France. Jeudi, les activistes se sont invités dans l’une de ses agences pour rappeler que le manque à gagner coûte, entre autre, à l’agriculture biologique et locale.
Cette fois, ils ont mangé. Dressé une table, posé une nappe – une belle, à pois blancs sur fond rouge – mis le couvert, servit les plats (uniquement du local et du bio). Et mangé, donc, tout bonnement. Rien de plus normal (après tout, il était près de midi), si ce n’est que ce déjeuner-là se tenait dans une agence BNP-Paribas de Paris, sous l’œil hagard des distributeurs de billets et sans que les convives n’aient été désirés.
Militants de l’ONG  Les amis de la terre ou du collectif ANV-COP21 (1), ils sont une vingtaine à s’être ainsi invités d’autorité, ce jeudi 1er décembre, à boulotter entre les murs de la première banque de la zone euro.
Revendicatif, le pique-nique visait à dénoncer le rôle de cette dernière dans l’évasion fiscale qui continue de sévir en France. Le manque à gagner, pour le pays, est compris entre 60 à 80 milliards d'euros par an, rappellent les organisations. Autant d’argent qui ne bénéficie pas aux recettes publiques et freine, insistent-elles, la mise en œuvre d’une transition écologique et sociale efficace.
L’initiative est loin d’être isolée. La campagne d’actions 2016-2017 a démarré le 2 novembre (lire : Les chaises assiègent BNP-Paribas), et voit, depuis lors, les opérations du même ordre se multiplier. Pas plus tard que ce mercredi 30 novembre, un « Fraudathon » s’est tenu à Saint-Nazaire, où 17 militants ont occupé une agence BNP-Paribas pendant près de trois heures. Ce même jour, quasi au même moment, une cinquantaine de personnes faisaient le siège d’une autre agence, BNP-Paribas toujours, mais à Toulouse cette fois, pour y organiser un « Question pour un champion de l’évasion fiscale » géant.
Lyon, Angers, Saumur, Biarritz, Evreux ou encore Bordeaux : en un mois, ce sont ainsi une dizaine d’agences BNP-Paribas qui ont été investies par les militants des Amis de la Terre, d’ANV-COP21, de Bizi !, d’Alternatiba et d’Attac, tous parties prenantes de ceux que l’on appelle désormais « les faucheurs de chaises » (2). Avec, pour chaque action, ce même propos - voilà ce à quoi l’argent détourné pourrait servir – décliné sur des thèmes variables. A Paris, ce jeudi, c’est à l’alimentation que l’on pensait.
Alors que la perspective d’imposer 20% de produits bio dans les cantines scolaires inquiète les élus locaux en mal de financements, « l'argent qui s'évade chaque année par le biais de 200 filiales de BNP-Paribas situées dans des paradis fiscaux devrait servir à financer cet objectif d'intérêt général »,pointait Pauline Boyer, porte-parole d'ANV-COP 21. « Avec cet argent, l'Etat pourrait favoriser l'achat de foncier agricole pour la création de fermes en agriculture paysanne et la structuration de filières locales d'approvisionnement », rappelait pour sa part Thomas Borrell, chargé de campagne pour les Amis de la terre.
Lutte contre le dérèglement climatique, développement du transport ferroviaire ou défense du système éducatif : les militants des organisations ont ainsi pris pour habitude de décliner leurs revendications et de les chiffrer, afin de mieux comparer les besoins à la perte induite par l’évasion fiscale. « 3,65 milliards d’euros par an permettraient de lancer un programme de rénovation thermique des bâtiments », énumérait, début novembre, Florent Compain, des Amis de la Terre. « 5,65 milliards d’euros par an suffiraient à la rénovation intégrale du réseau de chemin de fer d’ici à 2025, et il manque encore 7 milliards d’euros promis par la France à l’aide au développement… »
La santé n’est pas oubliée. Le 26 novembre, une cinquantaine de militants d’Attac, accompagnés de salariés du secteur médical, transformaient l’agence BNP-Paribas du boulevard Sébastopol, à Paris, en salle d’urgence. Ils dénonçaient ainsi le plan triennal prévoyant d’économiser 3,5 milliards d’euros sur le dos des hôpitaux et des malades. Une somme à peu près 20 fois moins importante que celle qui s’envole chaque année vers les îles.


(1) ANV, comme action non-violente, et COP21, du nom de la conférence climat par laquelle le monde s’est engagé, l’an dernier, dans l’accord de Paris.
(2) L’an dernier, leur action consistait à « emprunter » des chaises dans les agences des banques impliquées dans l’évasion fiscale. HSBC fut la première visée.
 
Pourquoi cibler spécifiquement BNB-Paribas ? D’abord, parce que la banque détient encore près de 200 filiales dans les paradis fiscaux. Ensuite, parce qu’elle s’est sévèrement retournée contre ceux qui dénoncent cet état de fait. L’an dernier, à la suite d’une action de fauchage de chaises, elle décidait de trainer en justice Jon Palais, militant de Bizi !. Le procès se tiendra le 9 janvier à Dax. Celui de « l’évasion fiscale en bande organisée » aussi, assurent les militants, qui préparent un gros coup ce jour-là et promettent que d’ici cette date, BNP-Paribas ne connaîtra pas de repos.

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