mardi 9 février 2016

La constitutionnalisation de l’Etat d’urgence votée dans une Assemblée aux trois quarts vide


La constitutionnalisation de l’Etat d’urgence votée dans une Assemblée aux trois quarts vide

MARDI, 9 FÉVRIER, 2016
HUMANITE.FR
Les députés français ont adopté lundi soir par 103 voix contre 26 l'article premier du projet de loi qui inscrit dans la Constitution l'état d'urgence. Ils s’attaquent ce mardi à l'examen de l'article 2 qui étend la déchéance de la nationalité française…
Ce premier volet du projet de loi constitutionnelle prévoit que l'état d'urgence sera "décrété en Conseil des ministres" soit "en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public", soit en cas de "calamité publique" (événements naturels).
Comme actuellement, seul le Parlement pourra proroger l'état d'urgence au-delà des douze jours initiaux, par une loi en fixant la durée.

Les amendements votés

Avec l'avis favorable du gouvernement, les députés ont voté peu avant un amendement de l'UDI pour restreindre la durée de prorogation à une période maximale de quatre mois, renouvelable après un vote du Parlement. Le Premier ministre, selon lequel cette durée "ne repose pas sur des éléments précis", a jugé que cette borne de quatre mois "ne modifie pas fondamentalement l'équilibre par rapport à ce qui a été voté de trois mois (pour l'état d'urgence en vigueur ndlr) et donne un peu plus de marge".
Les députés ont aussi ajouté dans le texte de révision constitutionnelle le principe du contrôle parlementaire de la mise en oeuvre de l'état d'urgence, souhaité par plusieurs groupes politiques, mais jugé superflu par certains députés LR. Contre l’avis du gouvernement et de la droite, les députés ont aussi voté un amendement socialiste prévoyant que l'Assemblée nationale se réunit de plein droit et ne peut être dissoute pendant l'état d'urgence. Mais ils ont rejeté l'inscription de la compétence du juge administratif quant aux mesures de police administrative, le gouvernement considérant que c'est sa compétence naturelle. Les parlementaires ont aussi refusé qu'une loi organique fixe les mesures de police administrative autorisées.
Les élus Front de gauche, mais aussi des écologistes, des socialistes "frondeurs", ainsi que quelques députés Les Républicains tels Pierre Lellouche et Bernard Debré ont en vain cherché à supprimer cet article 1er, synonyme de "recul de nos libertés", selon les mots de Noël Mamère (groupe écologiste).

Vers la déchéance de nationalité

Les députés ont ensuite engagé l'examen de l'article 2 qui étend la déchéance de la nationalité française des personnes condamnées pour terrorisme et qui est beaucoup plus contesté, à la fois dans la majorité et dans l'opposition. Cet article, dont l'examen se poursuivra mardi, est accompagné d'un projet de loi ordinaire qui sera débattu ultérieurement pour préciser sa portée.
A la demande du groupe PS, ce projet de loi ordinaire supprimera toute référence à l'interdiction de l'apatridie -- ce qui signifie un retour "à la déchéance pour tous", binationaux et mononationaux -- et précisera que cette déchéance sera une peine "complémentaire" prononcée le cas échéant par un juge antiterroriste ou pénal et non par l'autorité administrative.
Les députés se prononceront mercredi après-midi par un vote solennel sur l'ensemble du projet de loi que le Sénat examinera à son tour vers la mi-mars.
Pour être définitivement adoptée, toute révision constitutionnelle doit être d'abord votée dans les mêmes termes par les deux assemblées puis soumise au Parlement réuni en Congrès à Versailles où la majorité nécessaire est des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

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