Les droits des femmes renvoyés à la maison
MINA KACI
LUNDI, 15 FÉVRIER, 2016
L'HUMANITÉ
La nomination d’un ministère associant droits des femmes, famille et enfance laisse un goût amer chez les militantes, qui ne cessent de dénoncer les stéréotypes de genre.
François Hollande est-il prêt à bafouer les droits et la liberté des femmes pour séduire les conservateurs et autres réactionnaires, farouches alliés dans leur combat contre le mariage pour tous et les ABCD de l’égalité ? Après bien des reniements à ses engagements au lendemain de son élection à l’Élysée, voilà qu’il associe dans le même ministère droits des femmes, famille et enfance, et signe, ainsi, le retour des « stéréotypes les plus rétrogrades », selon les termes de Laurence Cohen, responsable du PCF.
Conception « archaïque »
Depuis le remaniement ministériel, les voix féministes s’élèvent pour dénoncer l’intitulé et s’inquiéter d’« un triptyque incongru qui subordonne les droits des femmes à ceux d’épouse ou de mère », explique Françoise Morvan, présidente de la Coordination française pour le lobby européen des femmes (Clef), et qui privilégie une conception « archaïque que l’on espérait révolue ». La colère est manifeste chez ces militantes, majoritairement de gauche, qui s’estiment trahies, abusées par un gouvernement censé accompagner l’éducation populaire qu’elles développent pour émanciper les femmes de ces rôles et qu’elles aient, comme les hommes, « les mêmes opportunités, les mêmes possibilités, tant sociales que professionnelles », note Ensemble,(Front de gauche).
À quatorze mois du scrutin présidentiel, François Hollande veut donner un signal fort à des électeurs supposés majoritairement acquis aux valeurs défendues par la famille Le Pen ainsi que par les intégristes religieux, aussi bien chrétiens que musulmans, que l’on a vu défiler main dans la main lors des « manifs pour tous » ou défier conjointement l’apprentissage de l’égalité entre les sexes au sein des établissements scolaires.
La parité renouvelée parmi les membres du gouvernement ne saurait camoufler les reculades du président de la République. En 2012, les féministes s’étaient réjouies que ce dernier répare la « faute politique » commise par la droite au pouvoir. Il avait alors rétabli le ministère des Droits des femmes, éliminé depuis 1988. En 2014, le même chef d’État supprime un ministère de plein exercice, confié à Najat Vallaud-Belkacem, pour le substituer à un simple secrétariat d’État dépourvu de moyens.
Révoltées, les féministes restent déterminées à montrer que leurs combats « sont toujours d’actualité, pour libérer la société des aliénations qui empêchent l’émancipation humaine », indique Laurence Cohen. Des réactions que Catherine Coutelle dit entendre. Présidente (PS) de la délégation aux droits des femmes à l’Assemblée nationale, elle rencontrera « prochainement » la ministre Laurence Rossignol pour s’assurer « personnellement » de « l’absence de confusion entre l’intitulé et la volonté politique ».
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