mardi 19 janvier 2016

De Nasser à Moubarak, un déni de démocratie


De Nasser à Moubarak, un déni de démocratie

LAURENT ETRE
MARDI, 19 JANVIER, 2016
L'HUMANITÉ

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Anouar El Sadate (à droite), assassiné par un islamiste, puis Hosni Moubarak chassé du pouvoir. p
Photo : AP Photo/Bill Foley
"Les Pharaons de l’Égypte moderne" ce soir sur Arte à 21 h 55. Arte diffuse ce soir un documentaire en trois volets sur l’histoire de l’Égypte, de la chute du roi Farouk en 1952 à celle de l’autocrate Moubarak en 2011. Un film riche en images d’archives et témoignages inédits.
«Pain, liberté, justice sociale ». Au printemps 2011, ce sont ces mots d’ordre que reprennent en chœur les manifestants de la place Tahrir, au Caire. Un slogan chargé d’histoire, puisqu’il résonnait déjà, cinquante-neuf ans plus tôt, dans les rues de la capitale égyptienne. Il s’agissait alors d’obtenir le départ du roi Farouk, fantoche des Britanniques. Entre la chute du monarque et celle de l’autocrate Moubarak, il y aura Nasser, puis Sadate. Le premier suscite d’abord de grands espoirs, par son choix du socialisme et ses réformes laïques. Mais il est aussi celui qui a « jeté les bases d’un État policier », pointe Jihan El Tahri, la réalisatrice de ce triptyque documentaire. Le second, Sadate, mourra sous les balles d’un islamiste radical, après avoir lui-même favorisé le développement de l’intégrisme musulman, avec l’idée d’affaiblir la gauche. Le volet consacré à cette période est certainement le plus intéressant, en particulier pour ses témoignages de personnalités au sujet de l’envoi de groupes djihadistes contre les Soviétiques, en Afghanistan. Par une telle politique, qui sera d’ailleurs poursuivie par son successeur, Sadate croit juguler la pression islamiste intérieure, qui commence à lui échapper, au moment où il négocie un traité de paix avec Israël, dans la foulée des accords de Camp David de 1978. Le bilan économique de ce « pharaon » n’est pas oublié. En cherchant à tout prix à attirer les capitaux américains, Sadate a appauvri son peuple. « L’afflux de produits étrangers a stoppé net la production locale », se souvient le syndicaliste Aboul-Ezz El Hariri. « Il y avait des produits de luxe en excès, mais pas de produits de base », renchérit le nassériste Hamdine Sabahi, alors leader étudiant. En janvier 1977, des émeutes populaires éclatent dans le pays pour protester contre la hausse des prix. « Un soulèvement de voleurs ! » ose Sadate. S’il ne livre pas de révélations particulières, ce documentaire offre une mise en perspective salutaire pour cerner les défis démocratiques et sociaux de l’Égypte d’aujourd’hui.

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