lundi 18 janvier 2016

Notre-Dame-des-Landes. Le verdict attendu fin janvier

Notre-Dame-des-Landes. Le verdict attendu fin janvier

Marion d’Allard
Jeudi, 14 Janvier, 2016
L'Humanité

 

Les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont donné de la voix, hier, sur le parvis du tribunal de grande instance de Nantes, alors que s’y tenait une audience cruciale
Photo : Jean-Sébastien Évrard/AFP
La justice examinait hier les demandes d'expulsion formulées par Ago Vinci, concessionnaire du futur aéroport. Devant le tribunal de Nantes, des centaines d'opposants sont venus soutenir les derniers habitants du site.
Nantes, envoyée spéciale. Les opposants au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont une nouvelle fois donné de la voix, hier, sur le parvis du tribunal de grande instance de Nantes, alors que s’y tenait une audience cruciale relative à la question des expulsions des derniers habitants du site.
Dans la foule de plusieurs centaines de manifestants, tous condamnent la procédure, lancée par Ago Vinci, concessionnaire du futur aéroport, contre ceux qui ont refusé de partir, empêchant ainsi le début des travaux. La société réclame leur expulsion immédiate, assortie d’une astreinte journalière de 200 à 1 000 euros et d’une mise sous séquestre de leurs biens et cheptels s’ils n’obtempèrent pas.
Cette assignation en référé, que d’aucuns perçoivent comme le dernier acte d’une longue série d’actions judiciaires, concerne en tout onze familles, propriétaires ou locataires de logements rétrocédés à Ago Vinci ainsi que quatre agriculteurs ayant refusé le règlement à l’amiable et les indemnités proposées par le concessionnaire en 2012. Les 244 autres personnes qui vivaient sur le site, elles, ont accepté, depuis la déclaration d’utilité publique du projet en 2008, de partir à l’amiable, rappellent les partisans de l’aéroport.

« Que François Hollande tienne parole !»

« Ces quatre exploitations agricoles représentent à elles seules près de 500 hectares, sur les 1 650 au total concernés par le projet d’aéroport », explique quant à lui, avant de pénétrer dans l’enceinte du tribunal, Sylvain Fresneau, éleveur à Notre-Dame-des-Landes. Sa famille y est installée « depuis cinq générations ». Loin d’être serein, il se dit « combatif » et rassuré par « la force de mobilisation du monde paysan venue défendre la ruralité et leurs racines ». À quelques pas de là, alors que les manifestants continuent d’affluer vers le tribunal, Jaco est là pour défendre « un autre modèle de société ». Pour ce militant environnementaliste, il est urgent que l’exécutif prenne ses responsabilités. « François Hollande s’était engagé à ce qu’aucune expulsion ne soit actée avant l’épuisement de tous les recours juridiques. Qu’il tienne parole, car des procédures d’appel sont en cours », s’insurge-t-il.
L’heure de l’audience approche. Et c’est sous les applaudissements, au son d’un biniou et à travers la foule scandant « on va gagner ! » que les assignés pénètrent dans la salle d’audience. Le juge ne tergiverse pas, annonçant d’emblée que les décisions sont mises en délibéré et la date du rendu fixée au 25 janvier prochain. La séance s’ouvre sur l’examen d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), posée par les avocats des derniers occupants du site. Ils estiment en effet l’éventualité d’une expulsion contraire à la Constitution française et à la législation européenne et ce, sur trois critères principaux que sont le droit au logement et à l’emploi, ainsi que le principe d’égalité face à la justice – rapport, notamment au respect de la trêve hivernale dans les procédures d’expulsion. En face, les avocats d’Ago Vinci demandent au juge des référés de ne pas transmettre cette QPC arguant, entre autres, que la seule chose qui pourrait être considérée comme inconstitutionnelle serait d’expulser sans indemnisation. Or, « le montant des indemnités a été fixé dès 2012 et les autorisations de travaux accordées en juillet 2013 », poursuit l’avocat d’Ago, insistant sur le fait qu’il est temps « que les travaux commencent » et qu’il s’agit bien là d’une « procédure particulière » étant donné que « l’intérêt général est en jeu ». Si le juge des référés n’a pas donné son appréciation sur cette question, la représentante du parquet a d’ores et déjà rejeté, hier, le « sérieux » de la question prioritaire de constitutionnalité déposée par les avocats des habitants du site.

Opposants et promoteurs du projet veulent que le dossier soit tranché

Quelle que soit la décision que la justice prendra in fine, c’est l’exaspération qui domine de toutes parts. Opposants et promoteurs du projet demandent que le dossier soit tranché une fois pour toutes. « C’est une situation intenable, nous n’avons aucune visibilité sur notre avenir », confie l’un des agriculteurs assignés. « Il faut qu’un tournant soit pris dans les semaines à venir, il faut l’arrêt définitif du projet », déclarait Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’Europe Écologie-les Verts (EELV), venue soutenir les opposants nantais.
« Le temps est venu pour qu’au plus haut niveau de l’État, une décision soit prise en clarté. Ce n’est plus possible », réaffirmait, quant à elle, la maire de Nantes, Johanna Rolland, qui défend pour sa part l’implantation du nouvel aéroport. Si l’Élysée reste pour l’heure muet, Ségolène Royal a en revanche joué la provocation en renvoyant, hier, la balle dans le camp des élus locaux, les enjoignant de « remettre les choses à plat, à la lumière des changements électoraux qui ont eu lieu », annonçant par ailleurs qu’elle ne prendra « pas d’initiative si localement il n’y a pas de volonté de dialoguer ». Le dossier Notre-Dame- des-Landes ne prend a priori pas le chemin du dénouement.

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