mercredi 18 mai 2016

Contre le 49-3, les salariés haussent le ton

Contre le 49-3, les salariés haussent le ton

Marc Bussone
Mardi, 17 Mai, 2016
L'Humanité

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1er mai à Marseille. Manifestation contre la loi travail.
Photo : AFP
Les transports, les raffineries, les ports et docks se préparent à une journée d’action forte, ce mardi, ponctuée d’appels à la grève parfois reconductible. Reportage à Marseille où la mobilisation s’amplifie.
Marseille, correspondance. Après les manifestations de jeudi dernier organisées dans toute la France pour protester contre le passage en force du gouvernement sur la loi travail, l’intersyndicale (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL, Fidl) veut donner un nouveau souffle à la mobilisation dès aujourd’hui, même si le texte a été adopté sans vote des députés en première lecture. Un appel à la grève a été lancé, lequel pourrait être suivi dans de nombreux secteurs et déboucher, pour certains, sur un arrêt de travail reconductible. « Quelque chose est en train de se passer, Valls risque de regretter son 49-3 », observe Olivier Mateu depuis son poste de secrétaire de la CGT des Bouches-du-Rhône, un département traditionnellement en pointe des luttes sociales. « On est sur un niveau de préparation semblable à celui qui a précédé la mobilisation monstre du 31 mars. Dans les entreprises, les salariés parlent de plus en plus de reconduction ou au moins d’actions concertées à installer dans les temps pour créer une dynamique entre les différents secteurs professionnels. On a également des appels dans le secteur public, poursuit le responsable syndical. Les travailleurs ont compris les dangers de cette loi travail et que tout le monde sera concerné. Du coup, il y a un ancrage dans les entreprises où cette loi va dégrader les conditions sociales. On sait que l’on ne pourra défendre nos droits dans l’avenir qu’à la seule condition qu’il nous reste des droits. »

« Les salariés refusent de se laisser faire »

Après le recours au 49-3 de la part du gouvernement, une grande partie de la base pousse à une extension du conflit. « Faire des journées de grève espacées, cela ne suffit plus face à ce gouvernement qui soit est sourd, soit nous mène en bateau, estime Bertrand, salarié de Kem One à l’étang de Berre. Ils veulent passer en force. Pour résister, il faut que toutes les professions s’unissent pour des actions concertées qui aient du poids. Comme ce gouvernement se prétend de gauche, il pense éviter le rapport de forces. »
Cette semaine risque d’être décisive pour la suite, la loi devant encore passer devant le Sénat avant de revenir à l’Assemblée. « Nous avons eu une belle assemblée générale, jeudi dernier, qui a voté le principe d’une grève reconductible. Nous avons déjà déposé un préavis de grève de 72 heures jusqu’à jeudi, raconte Pascal Galéoté, délégué CGT des agents du Grand Port maritime de Marseille. Nous sommes prêts à installer le conflit dans la durée. Les salariés refusent de se laisser faire. » Les dockers et les marins devraient également suivre le mouvement à l’appel de la fédération portuaire de la CGT. « Nous avons dans ce département très revendicatif une tradition de la convergence des luttes et c’est cette convergence qui va faire pencher la balance, estime de son côté Fabien Cros, responsable CGT de Total La Mède et président du comité central d’entreprise. Le coup de force du gouvernement a mis les gens en colère, c’est à nous de les convaincre d’entrer dans la lutte. Si on sent que la température monte de toutes part, cela nous aidera tous. »
Distributions de tracts dans les zones industrielles, discussions dans les entreprises, travail sur les convergences avec les mouvements de jeunesse mobilisés depuis le début du mouvement à Marseille, entrée dans l’action des routiers (voir l’entretien ci-contre)… le long week-end a permis de finaliser la préparation du mouvement à poursuivre jusqu’à la nouvelle journée de mobilisation du 23 mai. Le secteur de la pétrochimie a prévu de démarrer une grève tournante sur toutes les raffineries de l’étang de Berre dès aujourd’hui. « Il faut un mouvement continu et qui s’inscrive dans le temps contre ce projet historique de recul social, analyse Jean-Philippe Murru, secrétaire de la CGT de Fos-sur-Mer. Chaque entreprise a ses problèmes et les salariés se demandent parfois quel impact aura la grève dans leur usine face à un projet national. Mais si chacun attend les autres, personne ne fait rien ! Mais les gens comprennent que c’est le monde du travail dans son ensemble qui est concerné. »
Les revendications locales se greffent à la mobilisation générale. Les salariés de la centrale thermique E.On de Gardanne, dont la tranche charbon est menacée, sont ainsi de toutes les grèves et de toutes les manifestations. « Si la loi passe, les patrons pourront fermer sans aucun problème, prévoit Nicolas Casoni, leur délégué CGT. On reste pour l’instant sur les journées d’appel, mais on est prêt à suivre si le mouvement s’accélère. »
Manifestation ce mardi à Paris à l'appel de la CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, UNL, FIDL Île-de-France.
Départ à 14 heures de la place de l'École Militaire (près du MEDEF) en direction de Denfert Rochereau.
Trajet : École Militaire > bd des Invalides > bd du Montparnasse > bd Raspail > Denfert
Violence : un lycéen incarcéré. Après deux jours de garde à vue, un lycéen au casier judiciaire vierge a été mis en examen et placé en détention provisoire pour tentative d’homicide sur un policier frappé à la tête à coups de pieds et de barre de fer lors d’une manifestation à Nantes contre la loi travail, le 3 mai. Le lycéen a été interpellé jeudi alors qu’il participait à une nouvelle manifestation. Il a reconnu avoir fait chuter le policier, mais sans lui porter de coups. Des analyses scientifiques sont en cours, notamment sur la barre de fer utilisée par les agresseurs, un groupe de cinq ou six jeunes qui ont arraché le casque de la victime avant de le frapper.

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